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mais il ne peut convenir à tout. On peut auili lui reprocher une molleffe générale caute’e par le défaut de touche : ce défaut le remarque furtout dans fes draperies , & il y eft encore augmenté par fa confiance à ne point quitter l’ordre des tailles qu’il a une fois établies , tandis qu’il faut les abandonner brufquement quand l’ordre des plis l’exige. Les plis longs & étroits doivent être traités par des tailles prifes dans le ffens de leur longueur : ce procédé qui donne à la gravure une grande fermeté ne fe trouve point dans les ouvrages de Bloemaert ; il cherchoit ce qu’on appelle le flou , qui eft toujours voifin de la molleffe. Cette même molleffe fe remarque auffi dans l’on trait , qui tend plutôt à ïa ligne circulaire qu’au méplat. Ce défaut le rendoit plus propre à traiter les figures de femmes que celles d’hommes. Il a beaucoup gravé d’après Piètre de Ccrtone , & fa manière etoit affez d’accord avec celle de ce maître. Il feroit injufle de refufer une grande eftime à fes ouvrages s mais il feroit dangereux de les imiter fans intelligence. On doit préférer fans doute l’art d’Augultin Carrache pour la préparation des travaux : mais Bloemaert eft le premier graveur au burin qui ait fu finir une eftampe. C’eft dire affez qu’avant lui on avoit bien fu graver un deffin ; mais qu’il eft le premier qui ait bien fu graver un tableau. Quoique fa gravure fût généralement un peu froide , il la réchauffent par le ton , quand il gravoit a après de vigoureux coloriftes. On en peut voir entr’autres un exemple dans fon eftampe repréfentantSaint-Piene qui réffufcite Tabitha, gravée d’après Barbieri da Cento. Comme Bloemaert a fait école , nous allons donner fans interruption la fuite des graveurs qui ont adopté fa manière : car l’ordre chronologique n’autorife pas à détruire l’ordre des chofes. Il ne faut ni l’oublier entièrement , ni s’y trop affervir.

Si nous confierions feulement l’année de la naiffance de Charles Audran Se à’ Etienne Baudet, nous les placerions avant Bloemaert. Mais quoiqu’ils fuffent un peu plus âgés que cet artifte , comme il eft vraifemblable qu’ils ont plutôt imité que créé la manière , nous avons cru devoir les placer après lui.

■ (48) Charles Audran eft né à Paris en 1594 , & mort dans la même ville en 1674. Il apprit d’abord à graver dans fa patrie, & alla fe perfectionner à Rome : il put dans ces deux villes connoître Bloemaert , ou du moins fes ouvrages, & il mérite -d’être diftingué dans la foule des imitateurs de cet artifte.

(49) Etienne Eaudet , né à Blois en IJ98 , Se mort à Paris en 1671 a gravé d’une manière généralement allez dure un grand nombre de tableaux. Avec le grain quarré de Bloemaert, kl mêloit l’eau-forte au burin , ce qui ne peut G R A

l réulTir dans ce genre de gravure qui exige la plus grande pureté. On ne peut cependant refufer de l’eftime à fon eftampe de l’adoration du veau d’or , d’après le Pouffin & à quelques autres.

(50) Michel N a t a. 1 1 s , contemporain dô Bloemaert, outra lbuvent le grain quarré de ce graveur. Quoique fes eftampes aient du mente , elles peuvent fervir à prouver combien ce choix de travaux eft vicieux dans les chairs & les draperies. Il n’eft réellement propre qu’à graver la pierre , & il en donne le caractère à tous les objets où il domine. Quand Natalis a quitté cette manière quarrée , ce qui lui eft ai» rivé trop rarement , fa gravure ne manque ni d’agrément ni de douceur.

(5 1) Giles Rousselet , né à Paris en 1614, mort dans la même ville en 1686 , a gravé d’après le Guide les quatre travaux d’Hercule du cabinet du roi : ces eflampes font bien peintes Se d’un bel accord ; il faut cependant en excepter celle de Déjanire qui n’a pas l’harmonie des trois autres. Sa manière tient ordinairement de celle de Blsemaert ; mais fes travaux font plus larges , plus variés, Se fon exécution a plus de chaleur. Son eftampe d’après Bourdon , répréfentant la renommée qui porte 1 le portrait du Cardinal Mazarin au temple de l’immortalité , tandis que la Mufe de l’hiftoire offre à la France le récit des aâions de ce miniftre , eft un morceau qui mérite d’être diftingué. Mais fur-tout celle au Chrift au tombeau , d’après le Titien , eft à la fois d’une gravure moëlleufe , large Sr vigoureufe. Elle prouve qu’il étoit bon colorifte , & qu’il favoit très-bien rendre les étoffes Se les divers objets qui peuvent entrer dans un tableau. On a de lui des planches d’un effet fuave à la fois Se piquant.

(52) Guillaume Vaiiet , graveur François ui floriffoic vers le milieu du dix - feptième îècle a travaillé à Paris Se à Rome. Il gravoit d’une manière large Se colorée.

(53) François Poilly , né à Abbeville en 1622 , mort à Paris en 1693 , alla fe perfectionner à Rome dans l’art du deffin. Bloemaert fut dans la gravure le maître qu’il prit pour modèle , Se il réuffît parfaitement dans cette manière un peu froide , mais très-agréable & fort difficile. Les tailles qui fe croifent quarrément ne fouffrent point une manœuvre timide Se ne produii’ent un effet heureux que par leur parfaite égalité. La pureté de fon deffin répondoit a celle de fa gravure , Se confervera toujours un prix à fes ouvrages. Quoiqu’il ait été fans doute fécondé par d’habiles élèves , on ne conçoit pas qu’avec un procédé qui exige tant de patience Se de temps , il ait pu porter à près de quatre cents le nombre de fes planches. L’une des plus remarquables eft celle qui refie