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foibleffe du gros des amateurs, la condefcendance de ne pas imiter entièrement ces grands maîtres -, mais du moins leurs eftampes devroient être fouvent fous les yeux des graveurs ; & fur-tout à préfent que la gravure le refroidit de -plus en plus , ces exemples- deviennent chaque pur plus néceffaires. On y voit les véritables beautés de l’art -, & l’on gémit en penfant que , de nos jours , «lies font fi fouvent facrifiées à la froide manœuvre du métier.

Ce n’eft pas affez pour un graveur de fuivre ies contours tracés dans le tableau qu’il traduit, & d’en exprimer les lumières & les ombres -, il doit encore faire femir la couleur du maître , fon pinceau , fa couleur. Tout fon travail doit changer quandil cène de graver le même peintre. Il faut qu’on ne connciffe plus la manière du graveur, & qu’on reconnoiffe celle du maître. Les travaux qui rendront bien un tableau de Raphaë’ , ne conviendront pas à graver un tableau du Corrége ; Rubens ne doit pas ê :re gravé comme les Carraches, Lanfranc comme Piè :re de Cortone , ni Rembrandt comme le Titien. Enfin une eftampe doit rendre le deflin, l’efprit & le faire du peintre.

Cette partie fi importante de l’art eft reliée long-temps ignorée. On en doit la découverte aux artiftes qui ont gravé les tableaux de Rubens fous les yeux de ce maître , ou plutôt elle -eft due à ce maître lui-même qui dirigeoit leurs travaux & les forçoit à être peintres. Aufli ne fe font-ils pas feulement attachés à Tendre les dégradations des ombres aux chairs : ils orrc encore fait la plus grande attention à cette partie du clair-obfcur fi familière à Rubens , par laquelle les couleurs propres aident ■à étendre la maffe des lumières Se des ombres , parce que cerraiF.es couleurs par leur éclat , tiennent delà nature delà lumière , & d’autres tiennent de la nature de l’ombre par leur obfcurité. Amfi , dans les eftampes de ces graveurs , tout ce qui eft cbfcur, tout ce qui eft ■clair , n’eft pas toujours de la lumière ou de l’ombre ; c’eft fort fouvent la valeur de la couleur propre des objets repréféntés dans le tableau. On a donc eu raifbn de dire de leurs eftampes qu’elles étoient des tableaux elles-mêmes , &- qu’elles rendoient les couleurs ; non qu’en effet avec du noir Si du blanc les auteurs de ces gravures aient pu faire du jaune, au bleu, du rouge -, mais parce qu’ils ont confervé la valeur de ces couleurs différentes , enfcrte que chez eux le noir n’eft fouvent que î’expreffio-n xl’une couleur vigoureufe qui foutient & prolonge une maffe obfcure , & le clair m’eft que celle d’une couleur douce , qui étend & continue une maffe lunineufe.

Ils font les premiers qui aient employé ce

  • btl artifice , & , quoiqu’on fe foit attaché dans

iz fiute à les imiter , il eft rare que l’on ait eu GRÀ

le même fuccèi , & ils continuent d’obtenir les premiers rangs entre les grands coloriftes. « Ces » art :ftes , dit un amateur qui fait honneur à » l’Allemagne , M. Hagedorn , ces artiftes fe » font tellement diftingués par leurs productions , que celui qui voudrait écrire une

  • hiftoire de la gravure pourroit commencer

» par ces chefs-d’œuvre une époque dans l’art. » N’eft-iî pas bien étrange que , dans la peinture qui renferme la fource des couleurs locales , on confonde perpétuellement les notions des couleurs ? Il faudra à la fin que ie » gravei,r, qui n’a qu’une couleur pour rendre » fon expreilion , donne des leçons de colcris » au peintre »,

En détaillant les procédés de la manière de graver à i’eau-forte , & de graver au burin , nous avons parlé «le la pointe-sèche, troifième manœuvre qui s’unit aux deux autres. Elle opère fur le cuivre nud avec une pointe bien tranchante. Rembrandt en a fait un grand ufage ; mais comme il n’a pas divulgué (on fecret , il n’a pas eu d’imitateurs. En regardant bien attentivement certaines eftampes du dernier fièele , on y reconnort quelques travaux à la pointe sèche , mais fi rares qu’on ne les a pas même remarqués. Le premier qui , après Rembrandt , ait fait un grand emploi de ce moyen, & d’une manière propre à le combiner avec les autres parties d’une gravure foignée , eft M. Lebas. Il s’en fervoit pour les parties claires des ciels , desterraffes & même des figures en petit. Nous croyons nous être affez étendus fur les travaux de la gravure qui porte le nom de taille-douce. Il paroît convenable d’en proportionner la largeur à l’étendue de la planche, ou du moins à la dimenfion des principaux objets. Cependant an a vu d’habiles ardues s’écarter avec fuccès de cette convenance. On a des eftampes d’après Rubens & Van-Dyck , dont les travaux font fins & ferrés , quoique les figures foient d’une affez grande proportion. J. J. Flipart , dans fa dernière manière, a traité de grands fujetsavec une gravure firre & ferrée. Callot, le Clerc, qui gravoientde fort petites figures , n’affectoient pas des travaux très-fins , & l’on peut remarquer même que l’extrême fineffe des travaux dont fe font piqués en ces derniers temps des graveurs en petit , a fait beaucoup de tort à ce genre de gravure. Elle ’ les a engagés à remplacer par le fini froid & léché l’efprit qui doit animer ce genre. ( Article de M. Levesqve. )

GRAVEURS. L’hiftoire d’un art eft celle des artiftes qui l’ont profeffé depuis fon origine, & qui ont contribué à fes progrés & à fa perfection. Je crois donc que la meilleure manière de faire ici PJiiftoire de la gravure, eft de donner une notice chronologique des gra-