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G R A corps du Laocoon, les têtes de l’Antinoüs, de la Vénus, du Jupiter &c. montrent dans quelle proportion de dégrés une forme doit conduire à une autre. La gradation d’une forme refsentie à une forme délicate, & alternativement des formes douces aux formes majeures, produit la justesse des contours qui indique l’âge, le sexe, le caractère & l’action des figures. Par la gradation, on jouit sans choc des differences infinies qui se trouvent entre toutes les formes du corps qui cependant conserve son caractère général ;…mais c’est ici que les mots manquent ; c’est ici que les yeux même manqueront à tout homme qui n’aura pas étudié bien des années le crayon à la main, avec de la sagacité & de bons principes, les ouvrages célèbres que je viens de citer. Passons à la gradation dans les caractères.

Cette gradation sera sentie par tout homme d’esprit & c’est ce qui a fait juger le Poussin d’une manière si intéressante par tous les gens éclairés. Mais Raphaël le surpassoit encore. Pour montrer jusqu’où il portoit l’art des caractères dans tous les dégrés, choisissons dans les ouvrages de ce grand homme un des moins piquans par l’expression. Par exemple les noces de Psyché, qu’il a peintes à la Farnesine. Les Dieux y assistent avec dignité & par conséquent, on lit peu les affections de l’âme sur leurs visages ; mais comme on reconnoît toutes les différences des caractères ! par quelle sublime gradation, de Ganyméde tête simple & naïve, on arrive à la majesté terrible de Jupiter ! les femmes de même depuis Flore jusqu’à Junon, font parcourir par des dégrés qui multiplient l’intérêt, tous les différens genres de beautés, toutes les diverses sortes de graces.

Raphaël est, à mon jugement, le peintre qui a porté au plus haut dégré l’art des caractères, & il seroit difficile d’en nommer un autre qui ait su faire sentir, comme lui, leur gradation. On peut encore le citer pour celle des expressions, dans une scène immense où il a su l’appliquer, sans foiblesse, sans distraction. Je veux parler du tableau appellé la Dispute du Saint-Sacrement ; d’un côté, le dépit, l’inquiétude, l’agitation, la colère, l’envie se lisent dans les figures des Hérésiarques qui s’occupent à combattre la croyance de l’Eglise ; de l’autre, courage, force inspiration, pitié, voilà ce qui est très-bien exprimé dans celles des Pères réunis pour repousser leurs efforts. Toute cette partie terrestre du tableau, ne fait voir que des expressions qui tiennent à l’homme soit en bien soit en mal. La candeur, la profondeur de l’intelligence, la plénitude de la confiance, les transports de la béatitude : tels sont les mouvemens qui résident sur les nuages, & telle est la gradation par laquelle on parvient à la figure majestueuse qui représente la Divinité.


Nous pouvons parler d’un ouvrage aussi à fresque sur un sujet moins sublime, où les expressions sont graduées par des nuances bien subtiles, & cependant bien sensibles. Il est du Dominiquin à Grotta Ferrata. L’action en est simple. Un Saint Abbé guérit un jeune homme par l’attouchement d’une goutte d’huile. Ce personnage est tranquille mais pénétré d’une confiance toute divine ; & on parvient graduellement à cette expression pénétrante par celle du malade, dont la satisfaction intérieure est bien sentie, par les transports d’admiration du père, par la reconnoissance & la vive émotion de la mère, enfin par l’espèce de stupeur des assistans.

Disons qu’en général la gradation dans les diverses parties de l’art, sert à faire valoir un point par un autre point : non pas par un effet qui réponde à celui des oppositions ; mais en conduisant par degré au but d’intérêt que veut produire l’auteur de l’ouvrage : en cela bien différente de la variété qui admet tout pourvu que rien ne se ressemble, la gradation n’a d’effet que par l’accord qui se trouve entre des objets différens. Elle est mesurée, & ce n’est que par des intervalles proportionnés qu’elle s’avance à la perfection dans les grandes parties de l’art qui, comme nous l’avons dit, en sont toutes susceptibles. (Article de M. ROBIN.)

GRAIN (subst. masc.) Terme de gravure. Sur l’employe coulée concepteur L’effet Que produisent les Tailles Différemment croisées entr’elles. These Tailles Forment Un bon, non mauvais grain .

GRAND (adj.) On doit désigner le mot grand dans la peinture comme figuré, parce que le petit nombre d’acceptions dans lesquelles il est pris au propre, appartiennent plutôt à la langue générale, qu’au langage de l’art.

En effet on dit un grand tableau, comme on dit un grand meubie ou un homme plus grand que les autres ; mais lorsqu’on dit un grand caractère de composition ou de figure, une grande manière, on s’exprime figurement, & dans ce langage de l’art, on est même autorisé, par une manière de parler qui lui est propre, à dire Il y a dans ce que peint ou dessine le Corrège, par exemple, un grand, un certain grand qui frappe & qui plaît.

On dit de même une grande machine, pour désigner une composition imposante ; cette figure est grande, pour exprimer qu’elle est majestueuse. C’est donc relativement à l’impression que certains objets représentés font sur l’esprit & sur l’ame, plutôt que sur les regards, que l’on se sert du mot grand.

Le grand, dans ce sens figuré, appartient de bien près au sublime. Un grand caractere de dessin & d’expression est à-peu-près ce qu’on