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M

G OU exemple doit effrayer ceux qui voudroient fonder leur gloire sur un caprice passager : après avoir séduit la France, il a presque survécu à sa réputation.

« Le goût (ce mot peut s’entendre encore ici comme exprimant le sentimênt des convenances.) Le goût, dit Mengs, est ce qui détermine l’artiste à faire choix d’un objet principal, & à prendre ou à rejetter ce qui peut y avoir un rapport bon ou mauvais. Voilà pourquoi lorsque tout, dans un tableau, est exécuté d’une même manière, on dit que l’artiste a tout à fait manqué de goût, parce qu’il n’offre rien de pittoresque ni de distinct, & que par conséquent l’ouvrage est sans effet & sans expression. Le choix du peintre décide du style de l’ouvrage ; c’est ce qu’il faut appliquer au coloris, au clair-obscur, au jet des draperies & aux autres parties de la peinture ; de sorte que lorsqu’il sait choisir le plus beau & le plus grand dans chacune de ces parties, il produit immanquablement des ouvrages du plus grand goût. Le beau est ce qui rend toutes les qualités agréables d’une chose ; & le mauvais ce qui n’en montre que les parties désagréables. »

« Il faut donc étudier chaque chose pour voir ce qu’on voudroit y trouver, & pour choisir ensuite les parties qui répondent le mieux aux objets qu’on veut représenter : c’est de cette manière qu’on produit des choses véritablement belles. Qu’on examine, d’un autre côté, ce qui est de mauvais dans un objet & qu’on voudroit qui n’y fût point ; c’est ce qui seroit désagréable, & ce qu’il faut rejetter. »

« C’est en examinant ainsi les qualités des choses qu’on trouvera l’expression. Rien ne peut être expressif, s’il n’est rendu avec les qualités qui le caractérisent naturellement. Le bon, en général, est ce qui est utile & ce qui flatte agréablement nos sens ; & le mauvais, dans chaque chose, est la partie qui blesse nos yeux, & qui révolte notre jugement, en nous causant une sensation désagréable. »

« Notre esprit est choqué de tout ce qui n’est pas d’accord avec sa cause, & avec sa destination : il l’est donc quand notre vue est frappée d’un objet qui ne semble pas convenir avec la cause de son existence, ou avec sa destination, & que nous ne pouvons concevoir pourquoi il a telle ou telle forme. »

« Tout ce qui affecte trop fortement les nerfs optiques, offense la vue ; ce qui fait que certaines couleurs, ainsi que les lumières & les ombres trop tranchantes, fatiguent l’ame. Les hachures trop fortes, ainsi que les couleurs ou trop vives ou trop contrastées nous sont désagréables, par la raison qu’elles font


passer trop subitement nos yeux d’une sensation à une autre, & causent ainsi une tension violente de nerfs qui blesse nos yeux. Voilà pourquoi aussi l’harmonie nous est si agréable, parce qu’elle consiste à établir toujours des milieux entre les extrêmes. »

« Comme l’art de la peinture est très-difficile, il n’y a point encore eu d’artiste dont le goût ait été également parfait dans toutes les parties. Celui qui aura bien choisi dans l’une aura souvent fort mal réussi dans l’autre, & dans quelques-unes même il n’aura mis aucun choix. » (Article de M. Levesque.)

GR

GRACE (subst. fém.) Si la grace naît du juste accord des sentimens de l’âme avec l’action du corps, le peintre, pour la représenter, doit apprendre à bien connoître, par l’observation & par la méditation, la marche corrélative des affections & des mouvemens ; marche quelquefois parfaitement correspondante, mais trop souvent inégale, soit que l’expression éprouve quelque gêne, soit que le sentiment soit contraint ou peu sincère.

Le mot dont il s’agit ici est un de ceux qui sont adoptés avec la même acception dans tous les arts & dans l’usage ordinaire. C’est un terme de théorie générale, & ce sont les termes de cette espèce qui forment les liens par lesquels tous les beaux arts se trouvent unis les uns aux autres.

La grace d’une figure peinte ou sculptée, celle d’une figure décrite en vers, ou en prose, celle d’un air de musique, toutes ces graces ont le même principe.

Je prie les lecteurs de pardonner si je remets ici sous leurs yeux le chapitre de la grace tel qu’il se trouve à la suite du poëme de l’art de peindre ; ce que j’ai pensé & dit à ce sujet, ma paru confirmé par les observations que j’ai continué de faire ; il a été adopté par plusieurs auteurs qui ont écrit sur cette matiere, & je ne pourrois dire qu’à peu-près les mêmes choses en d’autres termes.

La grace, ainsi que la beauté, concourt à la perfection. Ces deux qualités se rapprochen dans l’ordre de nos idées : leur effet commun est de plaire : quelquefois on les confond, plus souvent on les distingue : elles se disputent la préférence qu’elles obtiennent suivant les circonstances.

La beauté supporte un examen réitéré & réfléchi ; ainsi l’on peut disputer le prix de la beauté, comme firent les trois déesses, tandis que le seul projet prémédité de montrer des graces, les fait disparoître.

Je crois que la beauté (comme je l’ai dit) consiste dans une conformation parfaitement