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GEN l’histoire, vous en serez d’autant plus digne, que vous ne dédaignerez aucun des autres genres.

« Faites de grace » vous dira quelqu’un qui a de vous l’opinion que doit inspirer un peintre du premier de tous les genres, « faites de grace le portrait de mon père, de mon ami ---Ce n’est pas mon genre, répondez-vous ; je ne dois pas perdre mon temps à un ouvrage au-dessous des occupations qui m’attachent uniquement : allez chez un peintre de portraits. »

Eh ! quoi, peindre un homme, c’est-à-dire, exprimer son caractère, rendre la toile vivante, exciter l’intérêt d’un fils, d’un époux, d’un tendre amant, d’une ame reconnoissante, sont des objets que vous regardez comme au-dessous de votre talent ! Quels miracles, en ce cas, ne devez vous pas faire ! Je vous en crois capable, mais j’aurai droit de vous juger avec sévérité, si votre réponse n’est dictée que par une suffisance dénuée de ce qui est nécessaire pour la soutenir. Sachez qu’en paroissant avoir la plus haute idée de votre art, vous le rabaissesz au contraire.

Faites donc avec plaisir, avec intérêt, avec sentiment, l’image d’un vieillard qui inspire un juste respect, comme excellent père de famille ; d’un jeune enfant qui vous offrira la veritable idée des graces de cet âge ; d’une femme que l’on reconnoisse aux vérités des formes, sans que vous ayez chargé les petits détails de ses traits ou exageré ses agrémens. Représentez des animaux, des paysages, des fleurs, & si vous avez un amour-propre secret, inspiré par vos occupations plus chéries & plus distinguées, faites en sorte que ces objets offrent, sous votre pinceau, par la touche & le faire, un caractère qui annonce qu’ils sont peints par un artiste au-detrus de ce qu’on appelle ordinairement peintre de genre.

Peintres de genre, à votre tour ayez la noble ambition de faire des excursions dans les pays qui semblent vous être interdits. Le portrait est votre patrimoine : à la bonne heure. Étudiez cependant la figure nue & l’antique, comme si vous étiez destinés à peindre des héros & des dieux. Ces portraits sont rares à faire aujourd’hui, j’en conviens ; mais vous ne pouvez prévoir le sort qui vous attend : exercez-vous à disposer plusieurs figures ensemble, vous sortirez plus facilement de la routine à laquelle vous vous habituez, en n’en composant qu’une seule.

Peintres paysagistes, peignez souvent la figure ; si non, par la difficulté qu’elle vous opposera, vous serez réduits à ne peindre que des déserts, ou des pays habités par des hommes estropiés.

Peintres d’animaux, si vous voulez que les chasses que vous représentez plaisent, faites que nous nous croyons transportés dans les forets


où elles se passent, que l’on s’y voie à la suite des chiens que vous peignez ; que l’on imagine parcourir ces beaux sites qu’embellissent tous les accidens & tous les charmes de la végétation. Si vous voulez aussi que ves troupeaux, vos moutons, vos vaches me rapellent les mœurs & les tems de Jacob & des Patriarches, que j’apperçoive que ces animaux sont heureux d’errer dans de beaux pâturages. Que leur gardien paroisse jouir du doux repos d’une vie simple, & qu’il semble exprimer ce sentiment sur le haut-bois champêtre.

Enfin vous qui peignez les fleurs & les fruits, joignez à la représentation de ces objets précieux les êtres qui en approchent le plus : si vous n’accompagnez pas souvent les objets dont les beautés sont inanimées, d’êtres vivans, vos tableaux paroîtront morts, & peu-à-peu vous vous restraindrez par routine & par nonchalance, à une vingtaine de fleurs & de fruits que vous combinerez dans quelques vases, comme un poëte sans génie combine un certain nombre d’expressions, de mots poëtiques & de rimes.

Tout artiste de genre, qui croit voir des bornes à son talent, retrécit ces bornes qu’il a imaginées, de manière qu’à la, fin elles l’emprisonnent.

Il est cependant vrai que le desir ambitieux d’étendre les genres, peut égarer quelquefois les artistes qui les pratiquent ; mais tout considéré, s’il faut tomber dans un défaut, choisissez plutôt celui-ci que l’autre.

Enfin pour terminer cet article, tous les genres, non-seulement s’avoisinent, mais se penètrent. Ce sont les nuances d’une couleur, dont participent toutes celles qui l’avoisinent. (Article de M. Watelet.)

GERSÉ (adj.) On dit d’DONT tableau non la couleur s’enlève par écailles qu’il EST gersé .

GIGANTESQUE (adj.) ne se prend pas en bonne part. Quand on dit cette figure est gigantesque, on n’entend pas qu’elle est d’une grandeur sublime, mais qu’elle est d’une grandeur outrée.

Quoique le collossal soit d’une proportion bien supérieure à la nature, sa destination n’est pas de paroître gigantesque, mais de présenter d’un point de vue éloigne les proportions de la nature.

Un collosse doit être vu de loin, dans une grande place, sur un édifice élevé, ou sur un socle qui l’éloigne de l’œil du spectateur. Posé sur le sol dans un lieu étroit, il deviendroit gigantesque, & blesseroit la vue.

Une petite figure dans un lieu vaste n’exciteroit pas l’attention. La statue de Louis XV,