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ENC ENC 247

M. le Comte de Caylus & M. Majault, qui ont beaucoup examiné cette matière, paroissent mettre de la différence entre les moyens d’exécution de ces deux genres. Voyez leur Mémoire, page 26.

On employoit aussi l’encaustique sur les murailles : cette pratique étoit-elle une suite de l’encaustique des tableaux, ou l’encaustique des tableaux avoit-il suggéré aux barbouilleurs de murailles d’en faire l’application à leurs travaux, pour rendre leur peinture plus solide ? Il est impossible de décider la question, soit que l’on consulte Vitruve ou Pline, qui en ont parlé. Cependant, si ces deux auteurs ne disent rien qui puisse éclaircir cette difficulté, ils nous en dedommagent par une description très-exacte de la manière de pratiquer cette espèce d’encaustique. Voici d’abord ce qu’en dit Vitruve[1], L. VII, C. IX, lorsqu’il parle de la préparation du minium : Cette couleur, dit-il, noircit lorsqu’elle est exposée au soleil, ce que plusieurs ont éprouvé, entr’autres le Scribe Fabérius, qui, ayant voulu que sa maison du Mont-Aventin fut ornée de belles peintures ; fit peindre tous les murs, des péristiles avec le minium, qui ne put durer que trente jours sans se gâter en plusieurs endroits, ce qui le contraignit de les faire peindre une seconde fois avec d’autres couleurs. Ceux qui sont plus exacts & plus curieux, pour conserver cette belle couleur après qu’elle a été couchée bien également & bien séchée, la couvrent de cire punique fondue avec un peu d’huile, &, ayant étendu cette composition avec une brosse, ils l’échauffent & la muraille aussi avec un réchaud où il y a du charbon allumé, fondant la cire & l’égalant par-tout en la polissant avec une bougie & des linges bien nets, comme quand on cire les statues de marbre. Cela s’appelle en grec. Cette croute de cire empêche que la lumière du soleil & de la lune ne mange la couleur[2]. Pline dit la même chose, quoique moins en détail :[3] Que l’on enduise la muraille de cire ; lorsqu’elle sera bien séchée, que l’on la frotte avec un bâton de cire & ensuite avec des linges bien nets. C’est par ce même procédé que l’on donne aux marbres de l’éclat. Il paroît par conséquent, qu’il n’y avoit qu’une seule manière d’employer l’encaustique sur les murailles.

Voilà tour ce que l’on peut dire sur l’historique & sur le faire des différentes espèces de peinture à l’encaustique, qui se réduisent à quatre ; savoir, la peinture à la cire, celle qui se faisoit avec le cestrum ou le viriculum, peinture sur les vaisseaux, & peinture sur la muraille ; & pour exécuter ces différentes espèces, ils mêloient les couleurs avec la cire, ou ils pénétroient la couleur de cire lorsque la peinture étoit achevée.

Le bois étoit la seule matière sur laquelle on peignît des tableaux portatifs. Il seroit trop long de rapporter tous les passages de Pline & des autres auteurs qui fournissent la preuve de cette vérité.

Passons maintenant aux moyens que les anciens employoient pour l’exécution de leurs encaustiques.

Les couleurs étoient contenues, comme le dit Varron, dans des coffrets à petits compartimens[4].

On se servoit de brosses ou de pinceaux pour appliquer les cires colorées, comme le dit Pline[5], ou la cire sur les couleurs comme le dit Vitruve.

On employoit le feu, soit pour fondre les cires colorées, soit pour liquéfier la cire pure destinée’à être employée sur les couleurs pour les rendre plus solides que la détrempe. Les instrumens destinés à cet usage portoient le nom de cauteria, dont la forme devoit varier selon les différens travaux auxquels on en faisoit l’application. Le cautere, dit Pline, étoit un des instrumens des peintres avec lequel on faisoit fondre les préparations bitumineuses les plus tenaces, dont on faisoit usage pour la peinture appellée encaustique. Cette peinture s’opère en faisant fondre des cires avec des charbons allumés[6]. Si l’origine de la peinture à l’encaustique est équivoque, l’époque de sa décadence est aussi fort incertaine. Il est néanmoins constant qu’elle se pratiquoit encore

  1. Traduction de Perrault.
  2. Itaque cum & alii multi, tune etiam Faberius Scriba, cum in Aventino voluisset habere domum eleganter expolitam, perystilii parietes omnes induxit minio, qui post dies triginta, facti sunt invenusto varioque colore : itaque primo locavit inducendus alios colores. At si quis subtilior fuerit & volueris expolitionem miniaceam suum colorent retinere, cum paries expolitus & aridus fuerit, tum ceram puniceam igui liquefactam, paulo oleo temporatam, setâ inducat. Deinde posteà carbonibus in ferreo vase compositis, eam ceram apprimè, cum pariete calefaciendo, sudare cogat, fiatque ut peræquetur. Posteà cum candelâ linteisque puris subigat uti signa marmorea nuda curantur. Hæc autem græce dicitur Vit. L. 7, C. 9.
  3. Solis atque lunæ contactus inimicus : remedium, ut parieti siccato cera punica cum oleo liquefacta candens setis inducatur, iterumque admotis gallæ carbonibus aduratur ad sudorem usque ; postea candelis subigatur, ac deindè linteis puris, ficut & marmora nitescunt. Plin. L. 33, C. 7.
  4. Pictores loculatas habent arculas, ubi discolores sunt ceræ : Var. de re Rust. L. 2.
  5. Resolutis igni ceris penicillo utendi.
  6. Cauterium in pictorum instrumentis continetur, quo bituminationes & fortiores quæque conglutinationes concoquuntur, maximè in eâ pictura quæ appellatur, quæ fit carbonibus inustis, resolutis igne ceris. Plin. L. 22, C. 23.