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qu’ils ne nuisent pas à l’effet principal. Elle revient aux détails, quand le génie est épuisé. » « On peut faire encore la même observation sur l’art dramatique. Les premiers drames se contenoient dans les bornes d’une imitation scrupuleuse. Les drames plus parfaits imitèrent ce qui étoit grand, expressif, utile & beau. Les drames reprennent ensuite la route des détails communs que leurs auteurs appellent des vérités, & sont retomber l’art au-dessous de ce qu’il étoit dans sa première barbarie. »

Il est des vérités dégoûtantes, il en est de fades, il en est d’horribles : elles ne sont pas l’objet de l’imitation des arts. Ne transportons ni sur la toile, ni sur la scène, les gueux & les pendus de Callot. (Article de M. Levesque).

DEVANT de tableau ; on nomme ainsi la partie antérieure du tableau, celle qu’il présente d’abord aux yeux pour les fixer & les attacher. Les arbres, par exemple, qui sont tout à la fois la partie la plus difficile du paysage, comme ils en sont le plus sensible ornement, doivent être rendus plus distincts sur le devant du tableau, & plus confus à mesure qu’on les présente dans l’éloignement. Peut-être que les paysages d’un des plus grands maîtres de l’école françoise, du peintre des batailles d’Alexandre (Lebrun), ne sont pas l’effet qu’ils devroient faire, parce que ce célèbre artiste a employé les bruns sur le devant de ces sortes de tableaux, & qu’il a toujours placé les clairs sur le derrière. Il est donc de la bonne ordonnance de ne jamais négliger, dans les parties d’un tableau, les règles du clair-obscur & de la perspective aërienne. Ajoutons en général que le peintre ne sauroit trop étudier les objets qui sont sur les premières lignes de son tableau, parce qu’ils attirent les yeux du spectateur, qu’ils impriment le premier caractère de vérité, & qu’ils contribuent extrêmement à faire jouer l’artifice du tableau, & à prévenir l’estime en faveur de tout l’ouvrage : en un mot, il faut toujours se faire une loi de déterminer les devans d’un tableau, par un travail exact, & bien entendu. (Article de M. le Chevalier de Jaucourt dans l’ancienne Encyclopédie).

Il faut observer sur cet article que ce n’est point un défaut dans un paysage de placer les bruns sur le devant du tableau, comme l’a insinué M. de Jaucourt. On voit de très beaux soleils couchant de Claude le Lorrain & d’autres paysagistes où cette distribution est loin de nuire au tableau. Mais ce seroit en effet un défaut, en plaçant la lumière sur les fonds de ses paysages, de trop forcer les bruns sur les de-


vans, de ne les pas refletter, & de ne pas observer sur les objets qui ne sont pas frappés de la lumière, l’effet que produisent les parties lumineuses dont toute la masse de l’air est imprégnée. (L.)

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DIMENSIONS. Les dimensions relatives entre l’objet qu’imite la peinture & l’objet imité, influent sur l’effet & sur les moyens qu’employe l’art.

Cette partie n’a peut-être pas été considérée autant qu’elle mérite de l’être.

Il n’est qu’un certain nombre d’objets dans la nature qui puissent être imités dans les mêmes dimensions qu’ils présentent ; il en est un bien plus grand nombre que le peintre est obligé de représenter dans des dimensions plus petites. Ces deux sortes d’imitations doivent agir & agissent en effet par leur dimension avant de produire aucun autre effet, parce que la dimension est ce qui nous frappe même avant que nous ayons fixé nos regards sur l’objet imité.

Il paroît naturel de croire, & je pense même qu’on ne peut douter qu’un objet, une figure d’homme ou de femme, par exemple, représentée dans la grandeur & les proportions naturelles, ne tire au profit de l’illusion un premier avantage de la conformité des dimensions.

Il est une infinité de circonstances où cet avantage est sensible. En effet on ne peut douter que la représentation que Rembrand fit de sa servante dont il exposa le tableau à sa fenêtre n’auroit pu tromper les passans, si l’imitation avoit été plus grande ou plus petite de proportion que la nature.

Mais il faut observer que plus ce moyen sert de base à l’illusion, plus cette illusion se détache pour ainsi-dire du libéral de l’art ; & en effet rien de si commun que de voir des représentations peintes qui, découpées & placées avec adresse, trompent ceux qui les apperçoivent sans avoir, à beaucoup près, les perfections qui sont estimer l’art. La représentation d’un homme assis dans un cabinet, tenant un livre, celle d’un chien, d’un chat, d’un amas de papiers & de livres placés bien avantageusement dans les endroits où on doit naturellement les rencontrer, obtiennent assez facilement l’hommage d’une illusion complette, & cependant ces ouvrages ne méritent à l’art & à l’artiste que l’applaudissement qu’on donne à une malice adroitement concertée, & qui réussit comme on l’a desiré.

Il faut penser qu’on fait naturellement alors une distinction très-fine entre tromper avec