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& représenter les ombres par des hachures, soit pour imiter ces mêmes ombres & les demi-teintes par le ministère de l’Estompe. On trouvera ce procedé au mot Estompe.

On dessine encore à la pierre noire, à la mine de plomb, à l’encre, soit ordinaire, soit de Chine. On dessine sur du papier blanc ou teinté de gris, de bleu ou bien de quelque autre couleur. Le ton coloré qu’on ajoute au papier donne lieu d’employer la craye ou crayon blanc pour désigner les lumières, comme on se sert des autres crayons pour représenter les ombres, soit par des hachures, soit en estompant, alors le fond du papier tient lieu de demi-teintes, & ces dessins commencent à s’approcher, par le clair-obscur plus prononcé, du systême de la couleur. Enfin, lorsqu’on employe quelques pastels pour indiquer les couleurs les teintes des objets qu’on dessine, on s’approche tout-à-fait de ce qu’on appelle peinture. Aussi je pense que les maîtres doivent acheminer par ces degrés leurs jeunes élèves vers le but auquel ils les dirigent. Ces marches successives & raisonnées tendent, comme on peut l’appercevoir, au but le plus essentiel en toutes sortes de connoissances, le veux dire, celui de lier les idées, de manière qu’elles se trouvent placées dans l’ordre le plus méthodique. (Article de M. Watelet.)

DESSINATEUR (subst masc.) Celui qui fait des dessins, par quelque procédé que ce soit, au crayon, à la plume, à l’estompe, au lavis, a des droits, par cette opération, au titre de dessinateur. Comme cependant il est d’ordinaire sculpteur, graveur ou peintre, c’est plutôt par ces qualités qu’on le désigne, & l’on réserve plus communément le nom de dessinateur à celui qui se consacre par état à faire des dessins pour les étoffés, les ornemens, les broderies. Quand on dit d’un peintre qu’il est dessinateur, on veut faire entendre qu’il a une bonne manière de dessiner, qu’il est pur, savant & correct dans son dessin. (L.)

DESSINER, faire des dessins à la plume, au crayon, au lavis, &c. Nous prendrons ici ce verbe dans l’acception où il signifie étudier la nature ou des imitations de la nature par la voie du dessin.

Gérard Lairesse & Raphaël Mengs vouloient que les maîtres commençassent par faire dessiner aux élèves des figures géométriques, sans le secours de la règle & du compas. Ils croyoient que cette méthode étoit plus capable que toute autre de leur donner la justesse du coup-d’œil qui seule conduit à déssiner correctement. Ils avoient observé qu’il n’est aucun objet dans la nature dont les contours & les formes ne soient composés de figures géométriques simples ou mixtes, d’où ils conclurent que l’élève


parvenu à tracer avec justesse ces figures à la simple vue, trouveroit ensuite peu de difficulté à dessiner correctement toutes les formes que présente la nature. Cette méthode procureroit un second avantage ; c’est qu’en faisant ainsi dessiner des figures géométriques aux élèves, on auroit soin de les leur démontrer, & dès leurs premiers pas dans l’art ils acquierroient la connoissance des premiers élémens de géométrie, qui, comme on sait, ne sont pas inutiles aux artistes.

On ne pourroit assurer que les maîtres de Raphaël aient commencé suivant cette méthode son éducation pittoresque ; mais il est certain du moins qu’ils lui apprirent à dessiner avec une correction si précise qu’on peut même l’appeller servile. Elle lui donna d’abord un goût sec ; mais comme elle lui avoit fait acquérir la justesse du coup-d’œil & l’habitude d’une imitation sévère, elle lui procura la facilité de prendre une belle manière de dessin, lorsqu’il eut vu les ouvrages de Michel-Ange, & les chefs-d’œuvre de l’antiquité. La sécheresse est, sans doute, un vice dans les maîtres ; encore leur pardonneroit-on jusqu’à un certain point ce vice s’ils le rachetoient par les grandes beautés qui en peuvent être voisines ; mais la sécheresse, causée par la recherche de l’extrême précision, & par la peine d’y parvenir lorsqu’on n’a pas encore acquis cette aisance que donne l’habitude, est assurément le plus excusable de tous les défauts que puisse avoir un élève. On n’est pas loin de l’époque où l’on sentira généralement le tort qu’on a fait à l’art en voulant que les élèves commençassent par être moëlleux & faciles.

Il ne faut pas craindre, dit Mengs, que la méthode géométrique nuise à l’élégance. L’élégance consiste dans la grande variété des lignes courbes & des angles, & ce n’est que la géométrie qui peut donner l’aisance de les exécuter.

Il veut que l’élève, après s’être attaché long-temps à dessiner des figures géométriques, s’exerce à tracer des contours d’après de bons dessins, &, ajoute-t-il, il y trouvera plus de facilité que les élèves formes par une autre méthode, puisqu’il aura contracté l’habitude de tracer toutes les figures qui peuvent contribuer à former ces contours. On ne négligera pas en même-tems de lui faire connoître les proportions du corps humain, que le maître aura soin de lui démontrer d’après celles des meilleures antiques. Quand il sera enfin parvenu à dessiner des contours avec franchise, on lui permettra de relever ses dessins par le clair-obscur, c’est-à-dire, de les accompagner d’ombres & de lumières. Il prendra en même-tems des leçons d’anatomie, & de perspective, pour se préparer à dessiner d’après nature. Ces deux