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& donnera à cette figure le caractère que doit avoir une figure animée.

C’est alors que les observations sur la partie mobile de l’anatomie, c’est-à-dire, la connoissance des muscles & des jointures, lui devient de plus en plus nécessaire ; car je ne faurois trop répéter, dans un tems où l’on se relâche sur cet objet important, que la comparaison habituelle de la charpente avec l’édifice, des os avec l’apparence de ces os, des muscles de la première & de la seconde couche avec les effets qu’ils produisent extérieurement, soit dans leur état tranquille, soit lorsqu’ils sont mis en action par le simple mouvement ou par les passions ; que ces études, dis-je, sont le fondement de l’art de dessiner & de l’art de peindre. Lorsque l’artiste sera parvenu à bien dessiner un figure nue, il s’étudiera à la draper, & la même attention qu’on lui a fait avoir de ne jamais dessiner la peau, sans se représenter ce qui est dessous, lui prescrira l’obligation de ne jamais dessiner une draperie, sans avoir, pour ainsi-dire, sous les yeux, les parties du corps qu’elle couvre ou qu’elle enveloppe. L’éléve que je hasarde de conduire passera enfin à assembler plusieurs objets, plusieurs corps, c’est-à-dire, à les groupper, à les composer ; & c’est alors qu’après avoir passé par une route difficile, il commencera à appercevoir, s’il raisonne sur son art ou s’il est bien instruit, l’immense carrière qu’il a à parcourir, c’est-à-dire, les loix auxquelles l’asservit le clair-obscur, l’harmonie colorée, l’unité de composition & d’intérêt ; enfin l’expression qui, fondée sur une étude continuelle de la nature spirituelle, exige le secours du génie,

Ce n’est plus ici le lieu de continuer cette instruction qui deviendroit trop étendue, & qui embrasseroit les parties de l’art auxquelles l’ordre alphabétique assigne d’autres places. Je reviendrai donc sur mes pas avec le jeune dessinateur, pour lui communiquer encore quelques observations qui tiennent aux premières notions.

Je viens de faire envisager jusqu’ici le dessin comme ayant pour but d’imiter les contours & les formes du corps humain, parce que c’est en effet dans l’art de la peinture son objet le plus noble, le plus difficile & le plus intéressant ; que d’ailleurs celui qui le remplit se trouve avoir acquis une facilité extrême à imiter les autres objets : cependant plusieurs de ces autres objets demandent des études particulières, & une habitude acquise pour les représenter avec justesse.

Les animaux exigent un soin particulier si l’on veut parvenir à les dessiner correctement, avec la grace & le caractère particulier dont chacun d’eux est susceptible. Ce sont des êtres animés, sujets à des passions, & capables de


mouvement, variés à l’infini. Les parties dont ils sont composés diffèrent des nôtres par les formes, par les proportions, par les jointures, par les articulations. Il est donc nécessaire qu’un dessinateur fasse sur eux des études, & sur-tout d’après ceux des animaux qui se trouvent plus ordinairement liés avec les usages & les actions ordinaires des hommes, ou avec les objets qu’il se destine plus particulièrement à traiter.

Rien de plus ordinaire aux peintres ou dessinateurs d’histoire que l’obligation de représenter des chevaux. Que de choses ne trouve-t-on pas souvent à desirer sur cet objet dans leurs ouvrages ? Il est à souhaiter que les jeunes artistes apprennent à en connoître l’anatomie, comme ils ont appris celle de l’homme qui leur est nécessaire ; ils risqueront moins de blesser la vérité dans les représentations qu’ils en sont, & qu’ils regardent trop souvent comme peu importantes.

Le paysage est une autre partie, d’autant plus essentielle à étudier & à raisonner qu’il est indispensable de mêler des conventions à la vérité de la nature. Car il est dans le paysage des objets si disproportionnés à la grandeur de l’imitation, qu’il n’est plus possible de suivre la nature avec la régularité qui peut avoir lieu dans l’imitation de l’homme. J’aurois pu faire cette observation, même en parlant des animaux ; mais elle est ici plus sensible & plus incontestable. On a peu observé jusqu’ici ce que cette différence, ou l’impossibilité de rendre les objets imités dans les proportions ou dimensions des objets naturels, occasionne dans le systême de l’imitation ; mais qu’on réfléchisse que jamais arbre n’ayant pu être imité de sa grandeur naturelle, comme un corps humain, on a été conduit à n’imiter exactement que les masses d’ombres & de lumière, & les formes générales, en désignant par quelques détails, artistement & discretement placés, les détails des feuilles, des branches, &c. On sentira alors qu’il a dû résulter de-là une différence dans le systême d’imitation dont il faut que le jeune dessinateur prenne connoissance, & qu’il sache ensuite étendre avec intelligence à tous les objets qui se trouvent dans le même cas, ou à ceux dont il exécute une imitation dans des proportions moins grandes.

J’en resterai là sur cette théorie qui seule feroit la matière d’un ouvrage considérable, mais qu’il est indispensable de restreindre, relativement à la forme de dictionnaire. J’ajouterai seulement qu’on se sert de différens moyens pour dessiner, qui ont tous des avantages particuliers, lorsqu’ils sont habilement employés.

La manière la plus généralement usitée est celle que j’ai décrite, c’est-à-dire, celle d’employer la sanguine, soit pour former le trait