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COP COR 153


plus riche, & en fit faire une copie par André del Sarte. Ce fut cette copie qui fut envoyée au Duc. Personne ne soupçonna la supercherie ; Jules Romain lui-même, qui étoit à Mantoue, fut trompé comme les autres, & crut reconnoître l’ouvrage de sa main. Il ne put être désabusé que par Vasari, qui avoit vu faire la copie, & qui lui montra les marques qu’on y avoit mises pour la reconnoître. Ce fait est à peine vraisemblable ; mais il faudroit pousser à l’excès le pyrrhonisme historique, pour récuser en cette occasion le témoignage de Vasari.

Bien des artistes conviennent modestement qu’ils pourroient être trompés à des copies : les marchands sont loin de faire le même aveu, & l’on trouve des amateurs qui s’expriment à cet égard comme les marchands.

En général, de belles parties des originaux sont perdues dans les copies ; celles sur-tout qui dépendent de la main du maître, & cette liberté qui donne tant de charmes au travail. Mais d’autres parties bien importantes sont conservées, si le copiste est habile : la composition, l’entente générale du clair-obscur & de la couleur, le dessin, si l’on en excepte les plus grandes finesses & l’extrême intelligence. On recherche une estampe faite d’après un bon tableau ; une bonne copie, même une copie passable en donne encore une idée plus juste. Les copies ne sont donc pas méprisables ; mais elles sont dédaignées par la vanité des amateurs. Ils les rejettent avec dédain quand ils sont avertis ; ils les révèrent comme des originaux quand ils sont abandonnés à leurs propres connoissances. Ils sont parvenus à les faire mépriser des jeunes artistes qui pourroient en retirer de grands avantages.

On distingue trois sortes de copies : les première, fidèles & serviles ; les secondes, faciles & peu fidèles ; les troisièmes, fidèles & faciles à la fois. La gêne que le copiste a éprouvée dans les premières, les fait aisément reconnoître, quoique le dessin & la couleur de l’original y soient conservées.

La facilité des secondes peut leur donner une apparence d’originalité ; mais comme le copiste ne s’est pas asservi à imiter exactement la touche, le pinceau, le style du maître qu’il a copié, on voit que le tableau n’est pas de la main de ce maître.

Les troistèmes, réunissant la facilité à une imitation précise, jettent dans le doute les plus grands connoisseurs.

Au reste si Jules-Romain fut trompé à la copie du portrait de Léon X, c’est que le tableau original n étoit pas entièrement de lui, & que son travail avoit été en grande partie recouvert par celui de Raphaël. On a beau raconter qu’un élève d’un peintre habile copia


si parfaitement un tableau de son maître que celui-ci y fut trompé. Croire tout ce qu’on raconte sans en examiner la possibilité, c’est se disposer à prendre pour des vérités une foule d’erreurs. M. Chardin assuroit qu’il ne se méprendroit jamais aux copies que l on pourroit faire de ses tableaux. Il faut avouer que tous les peintres ne sont pas aussi difficiles à copier que M. Chardin. (Article de M. Levesque.)

COPIER, faire des copies. Des hommes qui n’ont pas assez de talent tour produire de bons ouvrages, se consacrent a copier les ouvrages des autres : ce sont des copistes. De jeunes artistes copient les bons tableaux pour apprendre à les imiter ; ce sont des étudians, des élèves. Des hommes qui ont un talent déjà formé, copient des ouvrages des grands maîtres polir acquérir, des parties qui leur manquent. Le Poussin a copié le Titien ; Rubens a copié Raphaël : ces exemples semblent prouver que cet exercice rapporte peu de fruit quand on a déjà une manière faite.

Cette pratique de copier, nécessaire aux commençans, ne doit pas être trop long-temps continuée. On risque de se fatiguer à copier servilement les ouvrages des autres. L’ennui seul que cause cet exercice continuel peut dégoûter de l’art. On peut aussi contracter l’habitude de ne voir la nature qu’avec les yeux des autres, & de ne l’imiter en quelque sorte qu’avec le pinceau des autres. Il est à craindre enfin qu’on ne parvienne pas s’approprier les beautés des modèles qu’on copie, mais qu’on prenne leurs défauts, & qu’on les exagère encore. D’ailleurs, il n’est aucun chef-d’œuvre qui dans certaines parties, n’offre ce qu’on peut appeller des lieux communs de l’art, & l’étudiant en tireroit peu d’instruction. Il est d’autres parties qui sont foibles & défectueuses, qui tiennent à la manière propre de l’artiste & non pas à la nature. Il ne suffit pas de prendre pour exemple un bel ouvrage ; il faut en choisir les belles parties.

Si la principale beauté d’un tableau consiste dans l’effet général, on pourra prendre, en quelque sorte, note de cet effet par une esquisse, copier la pensée plutôt que la touche, l’ensemble plutôt que les `détails, & marcher dans la carrière des grands maîtres, sans repasser servilement sur leurs traces. Les facultés de s’engourdissent, quand elles ne sont pas exercées, quand on ne fait d’autre effort que celui de doubler les productions des autres. Nous n’avons fait que retracer dans cet article les conseils que M. Reynolds a donnés aux élèves de l’académie royale de Londres. (Article de M. Levesque.)

CORRECTION, (subst. fem.) « La correction du dessin consiste dans l’observation exacte


Beaux-Arts. Tome I. V