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procurer de la fraîcheur ; on l’emploiera avec succès à former des avenues, des allées, des quinconces, des salles, des groupes de verdure.

Pour planter des allées de marronniers, on met ces arbres a la distance de quinze, dix-huit & vingt pieds, selon la qualité du terrain & la largeur de l’allée.

On en peut aussi, faire de bonnes haies, en les plantant à quatre pieds de distance ; mais on ne doit pas l’employer à garnir des massifs ou des bosquets, parce qu’il se dégrade & dépérit entre les autres arbres, à moins qu’il ne domine sur eux.

Cet arbre souffre de fortes incisions sans inconvénient, & même de grandes mortoises. On a vu en Angleterre des palissades dont les pièces de support étoient infixées dans le tronc des marronniers, sans qu’il parût, après plusieurs années, que cela leur causât du dommage.

Cet arbre prend tout son accroissement au mois de mai, en trois semaines de temps ; pendant tout le reste de l’année, la sève n’est employée qu’à fortifier les nouvelles pousses, à former les boutons qui doivent s’ouvrir l’année suivante, à perfectionner le fruit, & à grossir sa tige & les branches.

Quoique le bois de marronnier ne soit pas d’une utilité générale & immédiate, on peut cependant en tirer du service. Il est blanc, tendre, molasse & filandreux ; il sert aux menuisiers, aux tourneurs, aux boisseliers, aux sculpteurs, même aux ébénistes, pour des ouvrages grossiers & couverts, soit par du placage ou de la peinture.

Ce bois n’est sujet à aucune vermoulure ; il reçoit un beau poli ; il prend aisément le vernis ; il a plus de fermeté & il se coupe plus net que le tilleul, & par conséquent, il est de meilleur service pour la gravure. Ce bois n’est un peu propre à brûler que quand il est verd.

Moyen d’ôter par la greffe au fruit du marronnier d’inde son amertume naturelle.

Transplantez le marronnier, & greffez-le ensuite de son propre bois ou de quelqu’une de ses pousses, par la greffe en canon ou en flûte, par la greffe en fente ou coupée, ou même en écusson.

Cette première greffe étant ainsi faite de l’une ou de l’autre façon, on sera attentif à la pousse qu’elle doit faire, pour ne laisser sur l’arbre au-dessous de la greffe aucun jet sauvage, ce qui lui pourroit nuire : dès que cette pousse sera en état d’être greffée d’elle-même sur elle-même, c’est-à-dire de son bois sur son bois, on y procédera pour la seconde fois, & de même ensuite pour la troisième fois, qui sera la dernière, à moins qu’on ne veuille les réitérer encore, pour augmenter de plus en plus la grosseur du fruit & la finesse du goût.

C’est ainsi qu’on en use tous les jours, meme sur les arbres déjà francs, dont on veut grossir & affiner les fruits. M. de Francheville, dans son mémoire sur ce sujet (académie de Berlin), assure qu’il en sera comme de la pêche, qui étoit si amère autrefois, qu’elle passoit pour venimeuse.

Utilité des marrons d’inde.

Les marrons d’inde présentent divers objets susceptibles d’utilité.

Nourriture du bétail .& des volailles.

M. le président Bon a trouvé que le fruit du marronnier peut servir à nourrir & à engraisser, tant le gros & menu bétail, que les volailles de toutes sortes, en prenant seulement la précaution de faire tremper pendant quarante-huit heures dans la lessive d’eau passée à la chaux vive les marrons, après les avoir pelés & coupés en quatre ; ensuite on les fait cuire & réduire en bouillie pour les donner aux animaux. On peut garder ces marrons toute l’année, en les faisant peler & sécher, soit au four ou au soleil.

M. Ellis, auteur anglais, qui a fait imprimer en 1738 un traité sur la culture de quelques arbres, paroît avoir trouvé un procédé plus simple pour ôter l’amertume aux marrons d’inde, & les faire servir de nourriture aux cochons & aux daims. Il fait emplir de marrons un vieux tonneau mal relié, qu’on fait tremper pendant trois ou quatre jours dans une rivière : nulle autre préparation.

Cependant on a vu des vaches & des poules manger de ce fruit dans son état naturel & malgré son amertume ; mais il y a lieu de croire que cette amertume fait un inconvénient, puisqu’on a remarqué que les poules qui mangeoient des marrons sans être préparés, ne pondoient point.

Amidon, farine, huile à brûler, lampe de nuit.

Ce fruit peut servir à faire de très-bef amidon, de la poudre à poudrer, de la farine pour la colle, une couleurnoire :& de l’huile à brûler ; il est vrai qu’on en tire peu, & qu’elle rend une odeur insupportable. Mais sans qu’il y ait cet inconvénient, un seul marron d’Inde peut servir de lampe de nuit ; il faut le faire sécher, le percer de part en part avec une vrille moyenne, le faire tremper au moins vingt-quatre heures dans quelque huile que ce soit, y passer une petite mèche, le mettre ensuite nager dans un vase plein d’eau, & allumer la mèche le soir ; on est assuré d’avoir de la lumière jusqu’au jour.

Pâte à décrasser.

On en peut faire aussi une excellente pâte à décrasser les mains & les pieds : il faut peler les marrons, les faire sécher, les piler dans un mortier couvert, & passer cette poudre dans un tamis très-fin. Quand on veut s’en servir, on jette une quantité convenable de cette poudre