Page:Emile Zola, Mes haines - Mon salon - Edouard Manet, Ed. Charpentier, 1893.djvu/59

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ainsi son personnage ; mais il a été entraîné malgré lui à dresser dans ce sens cette figure, qui est la seule vraie de l’ouvrage. L’amour que l’écrivain a pour la force et la réalité, l’a amené à doter si richement son héros, qu’il lui a conquis la sympathie de tous lecteurs. On admire cette puissante intelligence, cette nature calme et forte ; on aime ce père qui ne vit que pour sa fille, — et l’émotion profonde que cause cet amour paternel tend à la condamnation du célibat des prêtres ; on est tenté de battre ces paysans normands, si bêtement superstitieux, qui insultent cet homme de cœur et de conscience, — et cette sainte colère est comme un cri indigné qui réclame la liberté de conscience, le droit pour tous à l’amour et à la famille, la rupture des vœux qui lient l’homme à la divinité.

Sombreval est le seul être raisonnable et bien portant parmi les poupées hallucinées et souffrantes de Barbey d’Aurevilly ; il a la logique du bon sens et me paraît être le plus honnête homme du monde. Je vais à l’instant le relever de l’accusation de meurtre ; et, quant à son dernier sacrilège, lorsqu’il veut sauver Calixte, l’auteur prend lui-même le soin d’expliquer qu’il ne pouvait y avoir profanation pour cet incrédule, à communier avec l’hostie, qui n’était plus à ses yeux qu’un peu de farine.

En face de ce père, de cette âme droite et honnête, M. Barbey d’Aurevilly a placé deux autres figures de prêtres, l’abbé Hugon et l’abbé Méautis. L’abbé Hugon est la bonne âme qui revient de l’exil pour ap-