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vasion de 1814, la suite naturelle de Waterloo. Ce récit, écrit le premier, me paraît plus faible que les autres ; il contient d’excellentes peintures de combats, mais il s’y mêle un fantastique mal réussi et des velléités de roman d’aventures qui me gâtent cette belle simplicité qui est le talent même d’Erckmann-Chatrian. On dirait un mauvais pastiche des contes de Walter Scott. Les grandes figures que l’auteur y fait mouvoir sont des figures purement légendaires ; nous n’avons même plus ces braves Alsaciens que leur belle humeur rend parfois supportables. Les personnages se perdent dans le songe, et c’est grâce à quelque description vigoureuse et technique que les événements prennent une date.


IV


J’ai voulu seulement étudier, en toute franchise et en toute hardiesse, la personnalité, le tempérament d’Erckmann-Chatrian ; j’ai voulu faire l’anatomie littéraire d’un artiste qui a déjà beaucoup produit et qui a réussi à fixer l’attention publique. Mais je déclare, malgré mes restrictions, que cet auteur m’est très sympathique. L’importance que j’ai donnée à cette étude prouve le cas que je fais d’un écrivain sincère et consciencieux dont les ouvrages sont pleins de pages justes et vraies.

Si j’ai été trop sévère, j’ai péché par ignorance. Je ne connais pas ce monde alsacien qui emplit l’œuvre ;