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soit difficile de savoir à quoi s’en tenir devant les affirmations contraires de deux hommes honorables. Mais si ces messieurs en ont appelé à la foule, je crois qu’ils ont désiré que chacun se fît une opinion et la gardât pour lui. Ce n’est pas mon devoir de critique que de me prononcer dans une question de délicatesse. Je sens que la partie personnelle de leur procès ne m’appartient pas, car je croirais faire preuve d’un étrange mauvais goût, en disant à l’un ou à l’autre qu’il n’a pas agi d’une façon digne. On ne doit donc que lire, juger et se taire ; il m’est permis ici de regretter la querelle, il ne m’est pas permis de la discuter. Je ne puis et ne veux, je le répète, n’examiner que la question littéraire soulevée par les brochures.

Il est nécessaire, avant tout, de bien poser cette question, ainsi que je la comprends. M. de Girardin dit à M. Dumas fils : « Je vous ai donné des caractères et des développements, Je vous ai remis une œuvre vraie et logique, et vous me rendez une pièce dont les personnages sont effacés et les scènes adoucies, un drame de convention qui n’a plus que la vérité misérable des planches. » M. Dumas fils répond : « Votre pièce était dangereuse et impossible, elle aurait été sifflée, et je l’ai fait applaudir, j’ai mis assez de talent pour en faire un grand succès, remerciez-moi. »

J’avoue, pour ma part, que ce n’est pas là répondre. Ce que j’ai cherché dans la brochure de M. Dumas fils et ce que je n’y ai pas trouvé, c’est une critique, une suite d’arguments qui prouvât en règle que M. de