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SILAS MARNER



CHAPITRE PREMIER


Au temps où les rouets bourdonnaient activement dans les fermes, — où les grandes dames elles-mêmes, vêtues de soie et de dentelles, avaient leurs petits rouets de chêne poli, on pouvait voir, soit dans les chemins des districts éloignés, soit dans le sein profond des collines, certains hommes pâles et rabougris qui, auprès des gens vigoureux de la campagne, semblaient être les vestiges d’une race déshéritée. Le chien du berger aboyait avec fureur, lorsque l’un de ces hommes à la physionomie étrangère, apparaissait sur les hauteurs, et que sa silhouette noire se dessinait sur le ciel, au coucher hâtif du soleil d’hiver ; car, quel est le chien qui aime une figure courbée sous un sac pesant ? — et ces hommes pâles quittaient rarement leur pays sans ce fardeau mystérieux. Le berger lui-même, bien qu’il eût de bonnes raisons de croire que le sac ne contenait rien autre chose que du fil de lin, ou bien les longs rouleaux de