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CHAPITRE XVIII


Quelqu’un ouvrit la porte, à l’autre bout de la chambre. Nancy eut le pressentiment que c’était son mari. Elle tourna le dos à la fenêtre, la joie dans les yeux, car la plus grande crainte de l’épouse était apaisée.

« Mon ami, je suis si heureuse que vous soyez de retour, dit-elle, en s’avançant vers lui. Je commençais à être… »

Elle s’arrêta brusquement, car Godfrey déposait son chapeau de ses mains tremblantes, et se tournait vers sa femme, le visage pâle et le regard étrange et froid comme s’il la voyait réellement, mais comme s’il la voyait jouant un rôle dans une scène qu’elle-même ne voyait point. Nancy mit sa main sur le bras de son époux, n’osant pas continuer de parler, Godfrey cependant ne fit aucune attention à ce mouvement, et se jeta dans son fauteuil.

Jeanne était déjà à la porte avec l’urne sifflante[1].

« Dites-lui de s’éloigner, voulez-vous ? » reprit Godfrey ; et, lorsque la porte se fut refermée, il s’efforça de parier plus distinctement.

« Asseyez-vous, Nancy,… là, » ajouta-t-il, montrant

  1. Au lieu d’une théière ordinaire, on se sert souvent, lorsqu’une certaine quantité de thé est nécessaire, d’une urne d’où le liquide sort par un robinet. (N. du Tr.)