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ancien et de meilleur ; et, comme il ne fréquentait jamais de bourgeoisie d’une sphère plus élevée que la sienne, son opinion ne souffrait pas de la comparaison.

En entrant dans l’appartement il lança un regard sur son fils, et lui dit :

« Comment, monsieur ! vous[1] n’avez donc pas encore déjeuné non plus ? » Ils n’échangèrent aucune de ces salutations agréables du matin ; non point qu’il existât entre eux quelque inimitié, mais parce que la fleur suave de la courtoisie ne croissait pas dans des demeures telles que la Maison Rouge.

« Si, mon père, répondit Godfrey, j’ai déjeuné, mais je vous attendais pour vous parler.

— Ah ! bien, » reprit le squire, se jetant nonchalamment dans son fauteuil et parlant d’une voix pesante et tousseuse, — ce qui était regardé, à Raveloe, comme une sorte de privilège de son rang, — tandis qu’il coupait un morceau de bœuf, et le tendait au chien courant qui était entré avec lui.

« Sonnez pour qu’on apporte ma bière, voulez-vous ? Vos affaires, à vous autres jeunes gens, sont le plus souvent vos plaisirs personnels ; mais, si vous êtes pressés de les faire, les autres ne le sont pas. »

La vie du squire était tout aussi oisive que celle de ses fils ; toutefois, c’était une fiction entretenue par lui et ses contemporains, à Raveloe, que la jeunesse était exclusivement la période de la folie, et que

  1. Voyez note, page 43.