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tous des jeunes gens d’excellentes familles. On considérait M. Middleton, le curé actuel, comme une véritable acquisition ; malheureusement il devait bientôt partir.

Mais il y avait un point qu’elle était si désireuse d’emporter, qu’elle ne voulut pas laisser passer la soirée sans qu’il fût résolu. Elle savait que sa mère se soumettrait entièrement au jugement de son oncle pour ce qui regardait la dépense ; cette soumission était prudente ; car madame Davilow, persuadée qu’on la regardait toujours comme « la pauvre Fanny », qui avait fait une triste bévue avec son second mariage, éprouvait une satisfaction entière à se sentir identifiée avec la famille de sa sœur, et à savoir que ses affaires étaient dirigées par une autorité qui lui portait un intérêt véritable. C’est pourquoi la question d’un cheval de selle, déjà suffisamment discutée avec maman, devait être soumise à la décision de M. Gascoigne, et, après qu’elle se fut fait entendre sur le piano, qu’elle eut chanté, à la grande admiration de ses auditeurs, et qu’elle eût même décidé son oncle à dire avec elle un duo, elle saisit le moment opportun pour s’écrier :

— Maman, vous n’avez pas parlé à mon oncle de mon équitation.

— Gwendolen a le plus grand désir d’avoir un cheval de selle, dit madame Davilow en s’adressant à M. Gascoigne. Croyez-vous que nous puissions le faire ?

Le recteur avança la lèvre inférieure et regarda un peu sarcastiquement Gwendolen, gracieusement appuyée sur la chaise de sa mère.

— Nous pourrions lui prêter quelquefois le poney, dit madame Gascoigne, épiant l’expression du visage de son mari et toute prête à désapprouver la chose, si un seul de ses traits témoignait qu’il la regardât comme impossible.

— Ce serait vous gêner et vous déranger, ma tante, dit Gwendolen, et alors je n’y trouverais pas de plaisir. Du