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Grandcourt ne dit rien et continua de fumer. Lush alla se mettre à la fenêtre, ne voulant pas se retirer sans avoir vu l’effet de ses paroles. Il s’attendait à entendre Grandcourt lui reprocher d’avoir conduit l’affaire puisque madame Glasher habitait alors Gadsmere, c’est-à-dire à cent milles de là, et il était prêt à l’avouer ; ce qu’il voulait, c’est que Grandcourt fût ébranlé par l’idée que les avances qu’il ferait s’adresseraient à une femme qui connaissait tout et qui en avait été épouvantée. Mais Grandcourt se contenta de lui objecter ces deux mots :

— Et après ?

C’était répondre par un mat à l’ « échec » de Lush qui fit un mouvement d’épaules et voulut sortir. Mais Grandcourt se tournant vers la table, lui dit avec autant de calme que si rien ne s’était passé :

— Obligez-moi de m’avancer cette plume et ce papier, et attendez la lettre que je vais écrire.

Il griffonna quelques mots, plia la lettre, mit l’adresse et la poussant loin de lui, il dit :

— Que Hutchins aille la porter sur-le-champ, voulez-vous ?

Ainsi que Lush s’y attendait, cette lettre était adressée à miss Harleth, à Offendene. Après que son irritation se fut calmée, il se sentit satisfait de n’avoir pas eu d’explosion de colère à supporter ; mais il était certain que sa révélation avait replongé Grandcourt encore plus avant dans son ancienne détermination.