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XXI


Il était dix heures du matin quand Gwendolen Harleth, après son triste voyage depuis Leubronn, arriva à la station d’où elle devait se faire conduire à Offendene. Ni parents, ni voiture ne l’attendaient ; car, dans le télégramme qu’elle avait envoyé de Douvres, elle indiquait un train postérieur ; mais, dans son impatience et pour ne pas droguer dans une gare de Londres, elle était partie plus tôt, ne se figurant pas ce qui pouvait résulter d’arriver à une station distante de chez elle de plus d’une lieue, seule et avec ses nombreux bagages. Forcée d’attendre qu’un véhicule quelconque fût prêt à l’emmener, Gwendolen sentit que la crasseuse peinture de la salle d’attente et l’affiche en lettres gigantesques l’invitant à se repentir et à se convertir, étaient des choses par trop lugubres à ajouter à ses chagrins particuliers ; elle s’empressa donc de sortir et de regarder la grand’route et les champs. Mais le soleil lui parut mélancolique ; le vent d’automne faisait tomber les feuilles jaunes des arbres, frissonner l’herbe, et ébouriffait les plumes d’un coq et de deux poules qui