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réveillait d’un profond sommeil, ôta ses gants, puis son chapeau pour que la brise vînt rafraîchir son front, mais ne répondit pas.

M. Grandcourt t’a-t-il dit quelque chose ? Parle donc, mon enfant.

— Que dois-je vous dire, maman ?

— Je vois bien que quelque chose t’agite ; confie-le moi, Gwen, ne me laisse pas dans l’inquiétude.

Les yeux de madame Davilow se remplissaient de larmes.

— Chère maman, je vous en prie, ne vous faites point de chagrin. Vous me rendez malheureuse. Je suis encore dans le doute.

— Sur les intentions de M. Grandcourt ? demanda madame Davilow à laquelle ses alarmes donnaient de la décision.

— Non, pas du tout.

— Alors c’est sur le point de savoir si tu veux l’accepter.

— Précisément.

— Lui as-tu fait une réponse douteuse ?

— Je ne lui ai pas fait de réponse du tout.

— A-t-il parlé de façon à ce que tu ne puisses t’y méprendre ?

— Autant que j’ai voulu le laisser parler.

— Comptes-tu qu’il persévérera ?

Madame Davilow posa cette question en tremblant ; mais, ne recevant point de réponse, elle continua :

— L’aurais-tu découragé ?

— Je ne pense pas.

— Je croyais que tu l’aimais, ma chérie.

— Je l’aime aussi, maman, comme on peut aimer. Il y a moins à détester en lui qu’en la plupart des autres hommes. Il est froid et distingué.

Tout ceci avait été dit d’un ton grave et sérieux ; mais soudain sa malice lui revint, elle sourit et ajouta :