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Myrtes et Cyprès.

Je l’arrache, prenant plaisir à torturer
Mon propre cœur… et puis je me mets à pleurer.

Aux bords de ces étangs aux ondes toujours pures,
Que les saules pleureurs couvrent de leurs ramures,
N’y laissant pénétrer de la clarté des cieux
Qu’un rayon qui s’y perd vague et mystérieux,
Je marche solitaire et me voile la face ;
Mon regard affaibli ne voit plus dans l’espace,
Comme un miroir confus reflétant mon esprit,
Que brumes au matin et ténèbres la nuit.
— On dirait que parfois le mal qui me torture
Imprime le dégoût sur ton front, ô nature ! —
Et, si de ce linceul humide et malfaisant
Se dégage soudain l’astre resplendissant,
Je détourne les yeux, car mon pâle visage
Aux rayons réchauffants préfère le nuage.

Enfant, dans la forêt j’allais souvent m’asseoir,
Afin d’y respirer l’air parfumé du soir,