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LES FUSILLÉS DE MALINES

les mains et jouaient furieusement des genoux et des épaules.

Femmes et enfants, serrés à étouffer, dévoraient leurs cris sans une révolte. D’irascibles pâlots se laissaient bousculer, quitte à traiter leurs voisins de la même façon. Un sourire conciliant revenait aux lèvres après une fugitive expression d’amertume, et si un éclair de mauvaise humeur ou de défi jaillissait furtivement des prunelles, aussitôt en se rencontrant les regards pleins de mansuétude se pardonnaient, se rassuraient mutuellement.

Même au plus fort du remous, les communiants se réjouissaient de cette véhémente poussée, de cette solidarité étroite et virtuelle, heureux de se trouver en masse compacte, de se sentir les coudes, de se confondre dans une même pensée, de se mouvoir sous la même impulsion. Ils se complaisaient dans cette promiscuité chaude et magnétique. Un même fluide leur chatouillait les moelles ; ils effluvaient l’enthousiasme par tous les pores. Il y en avait dont l’expansion se traduisait en larmes tièdes, en paroles inarticulées, en soupirs câlins