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LES FUSILLÉS DE MALINES

tête, ils ruaient, soubresautaient, se cabraient, se tortillaient avec la frénésie d’étalons affolés par un essaim de guêpes, montraient le poing à des ennemis invisibles, crissaient des dents, projetaient les bras en l’air, brandissaient leurs bâtons, exécutaient de vertigineux moulinets au-dessus de leur tête. D’aucuns, pour se communiquer leur ravissement, se décochaient d’amicales gourmades en pleine poitrine, ou menaçaient de défoncer, à violents coups de coude, les côtes de leurs voisins.

Cependant, d’un signe magnétique le prêtre calma cette trombe humaine.

— Avant que vous vous mettiez en campagne, reprit-il, — cette fois avec une onction qui acheva d’apaiser le dernier tumulte, — j’ai tenu à vous prodiguer les saints Sacrements de l’Église. Ils entretiendront votre énergie et votre valeur. Ils vous seront un gage de triomphe et le signe de l’alliance que le Dieu des armées conclut avec vous ! À genoux, pauvres pénitents, humbles laboureurs ; à genoux, soldats du Christ !