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LES FUSILLÉS DE MALINES

pouvoirs établis, les mécontents qui ne manquent jamais dans aucun régime, notamment les déclassés de toute classe, les aventuriers, les bavards de café, les jeunes gens à tête chaude, bref, les Jacobins du pays ; désormais pour le représentant de la France, ils sont le peuple du pays, ne fussent-ils qu’une poignée et de la pire espèce. Défense aux autorités légales de les réprimer et de les punir ; ils sont inviolables. Par la menace ou de vive force, le représentant français intervient lui-même pour appuyer ou consacrer leurs attentats ; il casse ou fait casser par eux les organes vivants du corps social, ici la royauté ou l’aristocratie, là-bas le sénat et les magistratures, partout la hiérarchie ancienne, les statuts cantonaux, provinciaux ou municipaux, les fédérations ou constitutions séculaires. Sur cette table rase, il installe le gouvernement de la Raison, c’est-à-dire quelque contrefaçon postiche de la Constitution française ; à cet effet, il nomme lui-même les nouveaux magistrats. S’il permet qu’ils soient élus, c’est par ses clients et sous ses baïonnettes ; cela fait une République sujette, sous le nom d’alliée, et que des commissaires expédiés de Paris mènent tambour battant. On lui applique d’autorité le régime révolutionnaire, les lois antichrétiennes, spoliatrices et niveleuses. On fait et on refait