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LES FUSILLÉS DE MALINES

ne se méfiait plus de la ville et oubliait les pressentiments du matin, les effluves empoisonnés, les façades des maisons aussi rébarbatives que des mégères, la main invisible qui l’avait retenu par un pan de la blouse…

Finalement, Chiel lui-même écouta le porte-balle imaginatif, un peu éméché par les étapes, qui prétendait avoir fourni le trajet depuis Anvers, par Contich et Duffel, sans rencontrer l’ombre d’un uniforme républicain.

Survint un autre colporteur, plus positif encore, qui enchérit sur les avis rassurants de son confrère. Le premier, piqué d’émulation, ajouta des détails à sa version primitive. Ils se prenaient réciproquement à témoin pour attester la vérité de leurs fariboles.

De la meilleure foi du monde, en répétant ce qu’il glanait de la bouche des passants, un troisième, pour se donner de l’importance et se faire bien venir des écoutants, corsait et poivrait des inventions aussi saugrenues que contradictoires, transformait les hypothèses en flagrantes cer-