Page:Eekhoud - Les fusillés de Malines, 1891.pdf/120

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
114
LES FUSILLÉS DE MALINES

rement leur existence, en lapidant et décimant leurs impitoyables destructeurs.

Ceux de l’intérieur font pleuvoir sans cesse sur le pavé des liasses de parchemins, de grimoires, de formules, et vident sur la tête des agités du dehors, le contenu de centaines de cartons et de casiers. Ils parlent de faire prendre le chemin de ses refuges à souris à un greffier moins accommodant que ses collègues, mais, devant leur air déterminé, le bonhomme file doux et Malines n’aura pas de « défenestration » à opposer à celle de Prague.

En bas, au pied de l’édifice, les mains levées, moins pour attraper les bouquins que pour s’épargner des bosses, le populaire frondeur s’acharne sur ces tomes jaunes et moisis, qui lui représentent des siècles de vexations et de chicanes. On tire à quatre, on écartèle les plus solidement reliés. Et lorsqu’ils n’ont pas assez de leurs doigts pour les mettre en pièces, les gamins, que ce jeu amuse entre tous, les lacèrent à coups de dents.

En moins de dix minutes, le sac des bureaux de l’état-civil est terminé.