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LES FUSILLÉS DE MALINES

ils font main basse indifféremment sur tous les livres qui leur tombent sous la main, balaient les tables, basculent et culbutent les bibliothèques, crochètent les cadenas des coffres, fracturent tiroirs et layettes, fourragent et fouillent dans les dossiers, et soulèvent par leur pantomime effrénée, une trombe de poussière aussi suffocante que séculaire. En consommant l’anéantissement complet des documents de l’état-civil, ils se flattent d’empêcher, pour jamais, la confection des rôles de miliciens ; et comme le triage prendrait trop de temps, ils procèdent à la destruction, en bloc, des archives quelles qu’elles soient, sans en vérifier le contenu. De plus, incommodés par l’obscurité, l’exiguïté et la poussière des bureaux, ils ouvrent les fenêtres ; puis, afin d’aller plus vite en besogne, ils ne trouvent rien de mieux que de jeter à leurs camarades stationnant dans la rue, les rayons de paperasses et d’imprimés qu’ils n’ont pas le loisir de déchirer eux-mêmes. États, fastes, contrôles, matrices, lourds in-folio, piles de registres, s’écroulent et s’abattent dans le tas et menacent de défendre chè-