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30 juillet. — Journée excessivement chaude, sans vent. Un énorme requin s’est tenu le long de la coque pendant toute l’après-midi. Nous avons fait quelques tentatives infructueuses pour le prendre au moyen d’un nœud coulant. Auguste allait beaucoup plus mal et s’affaiblissait évidemment autant par manque d’une nourriture convenable que par l’effet de ses blessures. Il suppliait sans cesse qu’on le délivrât de ses souffrances, disant qu’il n’aspirait qu’à la mort. Ce soir-là, nous mangeâmes nos dernières olives, et nous trouvâmes l’eau de notre cruche trop putride pour pouvoir l’avaler sans y mêler un peu de vin. Il fut décidé que nous tuerions notre tortue dans la matinée.

31 juillet. — Après une nuit d’inquiétude et de fatigue excessives, dues à la position du navire, nous nous mîmes à tuer et à dépecer notre tortue. Il se trouva qu’elle était beaucoup moins forte que nous ne l’avions supposé, quoique de bonne qualité ; — toute la chair que nous en pûmes tirer ne montait pas à plus de dix livres. Dans le but d’en réserver une portion aussi longtemps que possible, nous la coupâmes en tranches très-minces, nous en remplîmes les trois jarres restantes et la bouteille au madère (que nous avions précieusement conservées), et nous versâmes dessus le vinaigre des olives. De cette façon, nous mîmes de côté trois livres environ de chair de tortue, nous promettant de n’y pas toucher avant d’avoir consommé le reste. Nous résolûmes de nous restreindre à une ration de 4 onces à peu près de viande par jour ; le tout devait donc nous durer treize jours. À la brune, pluie intense accompagnée d’éclairs et de vio-