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tout, il y discernait ce besoin de communier avec l’inconnu que lui-même ressentait.

Les femmes au teint obscur étaient belles, les métis surtout, sous le costume compliqué des Sahariennes qui leur donne l’air d’idoles anciennes. Drapées de voiles rouges ou bleus, chargées d’or et d’argent avec une coiffure large faite de tresses relevées au long des joues, recouvrant les oreilles de lourds anneaux, elles s’enveloppaient pour sortir d’une étoffe bleue sombre qui éteignait l’éclat des bijoux.

Leur charme étrange, le mystère de leur regard attirait Andreï.

Voluptueux, mais recherchant les voluptés grisantes illuminées de la divine lueur de l’illusion d’aimer, sans brutalité d’appétits, Andreï n’avait jamais trouvé qu’une saveur très médiocre aux assouvissements dépouillés de tout nimbe de rêve. Ce qui l’en éloignait surtout c’étaient leur banalité et la rancœur de l’inévitable et immédiat réveil.

Et il aimait à voir passer, dans l’incendie, du soir, les jeunes filles porteuses d’amphores, s’en allant en longues théories au pas rythmé vers les fontaines d’eau plus douce, aux confins du désert où le soleil mourant allongeait leurs ombres sur le sol brûlé.

… La vie d’Andreï s’écoulait en une quiétude heureuse, monotone et sans ennui.

Il se levait à l’heure légère de l’aube pour