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SUR LES OS HYOÏDES.

l’organisation des animaux ; suffisantes pour en altérer les formes, pour en faire varier les fonctions. Mais ces propositions conçues avec une toute puissance d’intelligence et d’avenir aujourd’hui universellement avérées, n’avaient cependant été recommandées à leur première apparition que par des démonstrations, fondées sur des faits, dont l’expérience des dernières années a révélé l’inexactitude. Cependant, dira-t-on, comment seraient vraies ces propositions générales, puis faux les faits, d’où elles auraient été déduites ? C’est qu’il existait par delà les faits observés encore quelqu’autre chose pour la pensée de ces hommes de génie. Tels étaient effectivement le droit et le propre de leur supériorité d’intelligence, qu’ils tenaient comme existant véritablement, ce que, dans leur force de conception, ils avaient jugé devoir être. Ainsi, pour ces hautes capacités, que les faits fussent nécessaires, ils étaient pressentis, pré-aperçus, conclus[1].

  1. Voulez-vous un autre exemple de cette toute puissance du génie ? Écoutez Montaigne, après qu’il a décrit un enfant monstrueux, du genre hétéradelphe. Montaigne, se portant toujours sur la raison des choses, connaît, mais rejette les explications des anciens sur la monstruosité. Aristote n’y voyait qu’un sujet de condamnation de la nature dérogeant à ses lois ; et Pline, rajeunissant cette pensée par un abus de l’esprit, avait dit : elle veut nous étonner et se divertir ; miracula nobis, ludibria sibi fecit natura. Du seul fait qu’il a sous les yeux, Montaigne