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D’UNE COCODETTE


grand imbécile de Tartufe[1] poussait l’aveuglement encore plus loin que ma mère[2].

Cela lui allait bien, à lui dont la maîtresse dépensait cent[3] mille francs par an pour se vêtir mieux qu’une princesse, de venir nous parler d’économie et de simplicité.

Chaque fois qu’il me rencontrait sur son chemin, cet homme pur ne manquait jamais de m’adresser quelque observation désobligeante.

Il disait à maman qu’il me trouvait laide. Et cela faisait pâmer d’aise la pauvre femme. Lui dire du mal de sa fille, n’était-ce pas la prendre par son faible ?

Je travaillais habituellement à préparer mes leçons dans la salle à manger. Deux portes qui se faisaient face donnaient entrée dans cette pièce. L’une était celle de l’antichambre, l’autre celle de la chambre à coucher de ma mère. Monsieur Gobert, quand il venait la voir, ce qui lui arrivait presque chaque jour, entrait par la première de ces portes, me faisait, en passant, un salut cérémonieux, s’éloignait par la porte de la chambre à coucher, et j’entendais presque aussitôt le frou-frou de la robe de soie de ma mère qui

  1. Variante, ligne 1, au lieu de Tartufe ; lire : républicain, car il était républicain !
  2. Variante, ligne 2, au lieu de ma mère ; lire : mon père.
  3. Variante, ligne 4, au lieu de cent lire : cinquante.