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amour vainqueur

beaucoup d’estime pour vous ! L’autre jour, après votre messe, tandis que vous étiez occupé à l’assemblée des marguilliers, il est venu m’apporter une belle boîte de cigares, et a passé plus d’une heure à converser avec moi dans l’espérance de vous voir !

Oh ! mon cher neveu, je t’assure que M. Howard me connaît ; nous irons l’un de ces jours saluer cette famille, avant ton départ ; tu as une vocation ecclésiastique et je n’aurais pas voulu, t’exposer à perdre cette vocation, en te mettant au contact de ces têtes légères qui peuvent tourner le cœur d’un jeune homme comme toi !

Rogers se sentit amèrement contrarié ! Son cœur de jeune homme à la vue de la gentillesse de ces demoiselles qui lui avaient parlé avec tant de déférence et d’affection, avait senti, en lui-même, comme une flamme de feu d’amour se réveiller, et se dit à lui-même : Oh ! J’ai des doutes sur ma vocation !

Faut-il, se dit-il, à lui-même, pour étudier sa vocation, se priver de toutes les joies, plaisirs même permis, pour rester comme emprisonné dans ce presbytère soumis sous la rigueur d’un règlement si sévère, et ne goûtant d’autres distractions que celle d’une conversation avec ce vieillard, que je ne peux contredire, et à qui je ne peux désobéir, pas même sur les sujets les plus indifférents.

Son oncle le Curé, constatant l’étendue du chagrin de Rogers qui pourtant faisait tous ses efforts pour le dissimuler : s’adressa à Rogers.

Viens avec moi, lui dit-il, en descendant l’escalier de la vérandah ; prends ta ligne et les rames, nous irons prendre de l’exercice, un tour de chaloupe, une partie de pêche, et une bonne pipée de tabac, voila qui sera bien plus à propos, va, mon garçon !

À cette invitation, le jeune Rogers dut obéir, et suivre M. le Curé, dans la direction de la rivière, à quelques dix minutes de marche ;

C’était une belle journée du mois d’août ; il faisait très chaud ; les eaux de la rivière étaient calmes ; le ciel était clair, à peine quelques légers nuages flottaient poussés par une