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déterminés qui reviennent toujours les mêmes dans les mêmes circonstances, et, une fois la cérémonie accomplie, il se trouve, pour les raisons exposées, que le résultat désiré paraît obtenu. Une association se forme donc entre l’idée de ce résultat et celle des gestes qui le précèdent ; et cette association ne varie pas d’un sujet à l’autre ; elle est la même pour tous les acteurs du rite, puisqu’elle est le produit d’une expérience collective. Toutefois, si aucun autre facteur n’intervenait, il ne se produirait qu’un état collectif d’attente ; une fois les gestes mimétiques accomplis, tout le monde s’attendrait, avec plus ou moins de confiance, à voir prochainement apparaître l’événement souhaité ; une règle impérative de la pensée ne se constituerait pas pour autant. Mais, comme un intérêt social de première importance est en jeu, la société ne peut laisser les choses suivre leur cours au gré des circonstances ; elle intervient donc activement de manière à en régler la marche conformément à ses besoins. Elle exige que cette cérémonie, dont elle ne peut se passer, soit répétée toutes les fois que c’est nécessaire et, par conséquent, que les mouvements, condition du succès, soient régulièrement exécutés : elle les impose obligatoirement. Or, ils impliquent une attitude définie de l’esprit qui, par contrecoup, participe de ce même caractère d’obligation. Prescrire qu’on doit imiter l’animal ou la plante pour les déterminer à renaître, c’est poser comme un axiome qui ne doit pas être mis en doute, que le semblable produit le semblable. L’opinion ne peut pas permettre aux individus de nier théoriquement ce principe, sans leur permettre en même temps de le violer dans leur conduite. Elle l’impose donc, tout comme les pratiques qui en dérivent, et ainsi le précepte rituel se double d’un précepte logique qui n’est que l’aspect intellectuel du premier. L’autorité de l’un et celle de l’autre dérivent de la même source, la société. Le respect que celle-ci inspire se communique aux manières de penser comme aux manières d’agir auxquelles elle attache du prix. On ne peut s’écarter des unes