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corps et une ame pour racheter l’homme tout entier. Car le pain se rapporte à la chair, et le vin à l’ame, parce que le vin forme le sang, où réside l’ame (XIII, q. ii, Moses). D’où vient qu’on lit dans le Lévitique : Anima carnis in sanguine, « L’ame de la chair est dans le sang. » Moïse, de son côté, atteste que la chair est offerte pour le corps et le sang pour l’ame : c’est pourquoi le pain et le vin sont offerts en sacrifice pour la protection du corps et de l’ame ; qu’on ne prenne donc pas sous l’espèce du pain l’espèce du sang avec le corps, mais qu’on ne prenne le sang que sous son espèce particulière, avec la pensée qu’on ne peut parvenir au salut que de cette manière. Et, quoique sous l’espèce du pain le sang soit pris avec le corps, et que sous l’espèce du vin le corps soit pris avec le sang, selon Innocent III, cependant le sang n’est pas bu sous l’espèce du pain, et le corps n’est pas mangé sous celle du vin, parce que, comme on ne mange pas le sang et comme on ne boit pas le corps, ainsi ni l’un ni l’autre n’est bu sous l’espèce du pain ou mangé sous celle du vin, quoiqu’il paraisse que l’on peut accorder que le corps est pris en buvant et le sang en mangeant. Il est donc, d’après cela, une manière de prendre le corps et le sang par laquelle ni l’un ni l’autre n’est mangé ni bu. Et voilà pourquoi il est décrété avec raison, dans le canon (De consec., dist. ii, Comperimus) : « Que le prêtre ne prenne pas le corps du Christ, sans son sang. » C’est pour cela que dans certains endroits après que l’on a pris le corps et le sang du Christ, on réserve une partie du sang dans le calice et on verse par-dessus du vin pur, afin que les communiants eux-mêmes en prennent ; car il ne conviendrait pas de consacrer autant de sang, et on ne trouverait point de calice assez grand pour contenir une telle quantité de vin. Mais, par le contact du sang, le vin que l’on verse dessus devient-il sacrement ? Nous en parlerons à ce mots : Hic est calix.

II. Suivent ces paroles : Postquam cœnatum est, « Après qu’on eut soupé. » Ce fut dans la quatorzième lune du premier