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l’apparence du pain ; le corps, le sang, le Christ tout entier se trouvent et sont pris sous l’espèce du vin, sans que pour cela il y ait double absorption. La raison en est que, quoique dans un même repas je mange avant de boire et après avoir bu, on ne dit pas pour cela que je prends deux repas. Nous parlerons de cela à la particule septième, à cette parole : Simili modo. Cependant, comme le dit le pape Léon (De consec., d. ii., In quibus) : « Pourquoi cherches-tu l’ordre de la nature dans le corps du Christ, puisque le Christ est né d’une vierge, en dehors des lois de la nature ? »

XXVIII. Ici vient se placer un fait digne de remarque :

Une certaine dame, chaque dimanche, offrait des pains au bienheureux Grégoire. Un jour que celui-ci, après la messe, lui présentait le corps du Seigneur et disait : Corpus Domini nostri Jesu Christi, etc., « Que le corps de notre Seigneur Jésus-Christ te garde pour la vie éternelle, » cette femme effrontée se mit à sourire. Le saint, éloignant rapidement l’hostie de sa bouche, déposa sur l’autel cette parcelle du corps du Seigneur ; ensuite, devant le peuple, il demanda à cette femme pourquoi elle avait la témérité de rire : « C’est, dit-elle, parce que tu appelais corps du Seigneur ce pain que j’ai pétri de mes mains. » Alors le saint se prosterna en prières pour expier l’incrédulité de cette femme, et, se levant, il trouva cette parcelle de pain devenue chair, ayant la forme d’un doigt ; et ainsi il convertit cette dame à la foi. Il pria de nouveau, et vit cette chair redevenue pain, dont il communia cette dame.

XXIX. On lit encore que Hugues de Saint-Victor, docteur éminent, étant malade de la maladie dont il mourut, demanda instamment à recevoir le corps du Seigneur ; mais, comme il ne pouvait garder aucune nourriture, ses frères, craignant les suites de cette perturbation de l’estomac, lui apportèrent une hostie non consacrée ; mais il reconnut en esprit cette supercherie : « Mes frères, dit-il, que Dieu ait pitié de vous ; pour-