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dist. ii, cap. iii, iv et v). Car la divinité est figurée par le vin, l’humanité par l’eau ; donc celui qui, servant à l’autel, donne au prêtre l’eau sans le vin ou le vin sans l’eau, sépare, autant qu’il dépend de lui, la divinité de l’humanité[1]. On parlera de cela à l’article du Canon, aux mots : Hoc est corpus meum et à ceux-ci : Hic est calix,

XX. C’est avec raison que le prêtre assistant, avant de verser le vin et l’eau dans le calice, en répand d’abord un peu par terre, non-seulement pour laver le col ou l’endroit du vase par lequel l’eau ou le vin doit couler, ou pour chasser une petite impureté qui aurait monté à la surface d’un de ces deux liquides, mais aussi pour montrer que le sang et l’eau coulèrent du côté du Christ jusqu’à terre, mystère que le célébrant se prépare à accomplir.

XXI. Il faut considérer aussi qu’on bénit l’eau[2] quand on la mêle au vin, tandis que, cependant, on ne bénit pas le vin ; et cela, comme disent quelques-uns : Premièrement, parce que ce vin attend qu’on le bénisse ; mais cette raison ne paraît pas suffisante, car alors le vin est tout entier, puisque dans la bénédiction du vin sous le nom de calice on bénit à la fois tant

  1. Au VIe siècle, les Arméniens ne mirent point d’eau dans le calice, et prétendirent s’autoriser d’une des homélies de S. Jean Chrysostôme sur S. Mathieu, Mais les Pères du Concile in Trullo, assemblés en 692 à Constantinople, où S. Jean Chrysostôme avait été évêque, firent voir que les Arméniens entendaient fort mal les écrits de ce saint docteur, qui avait seulement combattu les hérétiques qui ne sacrifiaient qu’avec de l’eau. Les Pères ajoutent que l’usage de mêler de l’eau avec du vin est fondé sur la tradition universelle des églises depuis Jésus-Christ, et ils déclarent que l’évêque ou le prêtre qui ne mettra que du vin dans le calice sera déposé comme un novateur qui ne suit pas l’ordre prescrit par les apôtres et qui n’exprime qu’imparfaitement le mystère du sacrifice (Conc. Trull., canon 32). Le décret d’union avec les Arméniens, dans le Concile de Florence, déclara aussi qu’il était nécessaire de mettre de l’eau dans le calice : « Cui (vino), ante consecrationem, aqua modicissima admisceri debet, etc. » (Conc, t. 12, col. 536).
  2. « Aux messes des Morts, le prêtre ne bénit pas l’eau par le signe de la croix, » disent les rubriques ; c’est une suite de la raison mystique indiquée par Durand. On n’emploie pas ce signe extérieur pour bénir l’eau, qui signifie le peuple, parce qu’on est tout occupé des âmes du purgatoire, qui ne sont plus en voie d’être bénites par le prêtre.