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LES AMANTES DU DIABLE

Babet était revenue mélancolique et consolée de chez le sorcier. Lui l’avait chassée car il attendait d’autres clientes et des envoyées de la ville où il avait de fidèles adhérentes. Toutes ou presque se trouvaient soumises par pactes à Satan.

Elle rentra donc dans sa chaumière sinistre et le sentiment de la prodigieuse misère qui régnait là, lui fut pour la première fois sensible.

Elle se rappelait d’avoir, tout à l’heure, vendu son âme au Diable. Il lui semblait maintenant que la richesse tardait par trop à se présenter, comme conséquence nécessaire et immédiate de son renoncement à la félicité du Paradis…

Elle s’assit à la porte et regarda le paysage glacé. Il était prodigieusement triste. Toutes ces roches énormes fermant les accès ; ces arbres dépouillés, et ce silence… Pendant qu’elle songeait ainsi, sans nul doute, Jean Hocquin, son mari, était-il torturé, peut-être pendu…

La rage et l’impuissance lui rongeaient l’esprit. Mais ce Malin, qui peut tant pour ses amantes, pourquoi n’intervenait-il pas, ne faisait-il pas un miracle…

Elle avait pu économiser secrètement huit pièces d’or, il faudrait en donner deux au sorcier. Était-ce par cette route que la fortune lui viendrait ?

Elle se leva, affamée et découragée. Un goût amer de soufre et de sauge lui emplissait la bouche.