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beaucoup pardonné parce que vous avez su réellement aimer, dit le curé de Turpenay avec conviction.

— Vous soutenez donc le vice, Monsieur ? fit le roi Cauda.

— Vous confondez, répliqua Moncupette : le vice est la pressure de la passion, comme celle-ci est l’alcool de l’amour. Le vice est toujours haïssable ; la passion est souvent sublime ; elle est l’expression de l’exubérance de la vie s’insurgeant contre le néant, l’affirmation du génie humain. Elle exhausse l’homme jusqu’aux cieux où on aperçoit Dieu. Le vice, au contraire, diminue l’homme, le réincarne par chutes progressives dans la bête, l’aberre, exsue son cerveau, l’halluciné jusqu’aux hypocrisies les plus honteuses, et il est encore le mensonge perpétuel. Entre l’homme dépravé par le vice et le forçat échappé du bagne, l’analogie est frappante ; tous deux sont placés au banc de l’honneur ; ils s’agitent obliques pour tromper, s’ingénient, s’exagèrent pour paraître la vertu avec la conscience exaspérante de leur indignité. L’un, relaps de l’amour, voit le gendarme en sa femme, gardienne du foyer et de son honneur, dans son enfant qui tend son front virginal à ses baisers impurs, dans l’ami qui lui tend la main, dans tout ce qui sourit, dans tout ce qui aime ; l’autre est son sosie moins ignoble.