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bas, soit qu’il poursuivit une beauté profane, soit qu’il pénétrât dans quelque saint monastère, soit qu’il eût pour but l’amour de quelque épouse adultère ou de quelque chaste jeune fille, Lorenzo entreprenait tout. — Lorenzo menait tout à bien. — Aussi Lorenzo était-il le plus puissant et le plus détesté à Florence, après le duc.

De son côté, Lorenzo avait un homme qui lui était aussi dévoué que lui-même paraissait l’être au duc Alexandre. Cet homme était tout bonnement un certain Michel del Tovallaccino, un sbire, un assassin qu’il avait fait gracier pour un meurtre, que ses camarades de prison avaient baptisé du nom de Scoronconcolo, nom qui lui était resté, à cause de sa bizarrerie même. Dès lors cet homme était entré à son service et faisait partie de sa maison, lui témoignait une reconnaissance extrême, et cela à tel point qu’une fois Lorenzo s’étant plaint devant lui de l’ennui que lui donnait un certain intrigant, Scoronconcolo avait répondu : — Maître, dites-moi seulement quel est le nom de cet homme, et je vous promets que demain il ne vous gênera plus. — Et comme Lorenzo s’en plaignait encore un autre jour : — Mais dites-moi donc qui il est ? demanda le sbire. Fût-ce quelque favori du duc, je le tuerai. — Enfin, comme une troisième fois Lorenzo revenait encore à se plaindre du même homme : — Son nom ! son nom ! s’était écrié Scoronconcolo ; car je le poignarderai, fût-ce le Christ ! — Cependant, pour cette fois, Lorenzo ne lui dit rien encore. — Le temps n’était pas venu.

Un matin le duc fit dire à Lorenzo de le venir voir plus tôt que de coutume. Lorenzo accourut : il trouva le duc encore couché. La veille, il avait vu une très jolie femme, celle de Léonard Ginori, et la voulait avoir. C’était pour cela qu’il faisait appeler Lorenzo ; et il avait d’autant plus compté sur lui, que celle dont il avait envie était la tante même de Lorenzo. Lorenzo écouta la proposition avec la même tranquillité que s’il se fût agi d’une étrangère, et répondit à Alexandre, comme il avait coutume de lui répondre, qu’avec de l’argent toutes choses étaient faciles. Alexandre répliqua qu’il savait bien où était son trésor, et qu’il n’avait qu’à prendre ce dont il avait besoin ; puis Alexandre passa dans