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dormeuse entr’ouvrait les yeux : « Réveillez-vous, ma belle fiancée, lui dit-il. » Puis se retournant vers la Gualdrada : « Envoyez chercher le prêtre, ma mère ; et si votre fille m’accepte pour époux, conduisez-nous à l’autel ! »

Le même jour, Buondelmoute épousa Lucia Gualdrada, de la maison des Donati.

Le lendemain, le bruit de ce mariage se répandit. Les Amadei doutèrent quelque temps de l’outrage qui leur avait été fait, mais un moment vint où ils n’en purent plus douter. Alors ils convoquèrent leurs parens, les Uberti, les Fifanti, les Lamberti et les Gualdalandi ; et lorsqu’ils furent rassemblés, leur exposèrent la cause de cette réunion. Dans ces temps d’honneur irascible et de prompte vengeance, un pareil affront ne pouvait se laver que dans le sang. Mosca proposa la mort de Buondelmonte, et sa mort fut résolue à l’unanimité.

Le matin de Pâques, Buondelmonte venait de traverser le vieux pont, et descendait Longo-l’Arno, lorsque plusieurs hommes à cheval, comme lui, débouchèrent de la rue de la Trinité, et marchèrent à sa rencontre. Arrivés à une certaine distance, ils se séparèrent en deux troupes, afin de l’attaquer de deux côtés. Buondelmonte reconnut ceux qui venaient à lui pour des ennemis ; mais soit confiance dans leur loyauté ou dans son courage, il continua son chemin sans donner aucune marque de défiance ; loin de là, en arrivant près d’eux, il les salua avec courtoisie. Alors Schazetto des Uberti sortit de dessous son manteau son bras armé d’une masse, et d’un seul coup il renversa Buondelmonte de cheval. Au même moment, Addo Arrighi mettant pied à terre, de peur qu’il ne fût qu’étourdi, lui ouvrit les veines avec son couteau. Buondelmonte se traîna jusqu’au pied de Mars, protecteur païen de Florence, dont la statue était encore debout, et expira. Le bruit de ce meurtre ne tarda point à retentir dans la ville. Tous les parens de Buondelmonte se rassemblèrent dans la maison mortuaire, firent atteler un char, et y placèrent dans une bière découverte le corps de la victime. La jeune veuve s’assit sur le bord du cercueil, appuya la tête fracassée de son époux sur sa poitrine ; les plus proches parens l’entourèrent, et le cortège se mit en