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sista pour que Francesco, fatigué de la veille, allât prendre quelque repos ; Francesco céda à la condition qu’on le réveillerait aussitôt que sa bien-aimée Bianca recommencerait à souffrir. Bianca le lui promit, et sur cette promesse, le grand-duc se retira.

Deux heures après, on alla le réveiller en effet, mais pour lui annoncer qu’il était père d’un garçon. Il courut à la chambre de Bianca qui, du plus loin qu’elle l’aperçut, lui présenta son enfant. Le grand-duc pensa devenir fou de joie, et l’enfant fut baptisé sous le nom de don Antoine, Bianca ayant déclaré que c’était aux prières de ce saint qu’elle devait la première conception qui les rendait tous si heureux à cette heure.

Dix-huit mois après l’accouchement de Bianca, on renvoya dans sa patrie la Bolonaise qui avait conduit toute cette intrigue. La gouvernante partit sans défiance et comblée de présens ; mais, en traversant les montagnes, sa voiture fut attaquée par des hommes masqués qui tirèrent sur elle et la laissèrent pour morte, blessée de trois coups d’arquebuse. Néanmoins, contre toute attente, elle reprit ses sens, et, comme le juge du village où elle avait été transportée l’interrogeait, elle déclara que, le masque d’un de ces hommes étant tombé, elle avait reconnu un sbire au service de la Bianca ; qu’au reste, elle avait mérité cette punition (quoiqu’elle ne s’attendît point à la recevoir d’une semblable main), puisqu’elle avait aidé à tromper le grand-duc François en donnant à sa maîtresse le conseil de se faire passer pour enceinte, et, le projet adopté, en apportant elle-même dans un luth l’enfant dont une pauvre femme était accouchée la veille. Or, cet enfant n’était autre que celui qui était élevé sous le titre du jeune prince, et sous le nom de don Antonio. Cette confession faite, la femme expira. Aussitôt le procès-verbal en fut envoyé à Rome au cardinal Ferdinand de Médicis, qui en fit faire une copie qu’il adressa à son frère ; mais il fut facile à Bianca de faire croire à son amant que tout cela n’était qu’une intrigue ourdie contre elle, et l’amour du grand-duc ne fit que s’augmenter de ce qu’il regardait comme une persécution dirigée contre sa maîtresse.

Cependant, l’affaire, on le comprend bien, avait fait trop