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préparait à dîner, j’eus donc le temps d’aller, Schiller à la main, faire ma visite au tombeau de Fiesque.

Par la même occasion, je parcourus l’arsenal de mer. Dans la première enceinte, Gênes, encore aujourd’hui, arme, désarme ou répare ses vaisseaux. À cette enceinte a succédé une seconde, desséchée, et qui n’est à cette heure autre que le vaste chantier maritime où la république construisait ces fameuses galères, longues de 58 mètres, larges de 4, qui coûtaient chacune sept milles livres génoises, et qui, montées par 250 hommes, parcouraient en maîtresses toute la Méditerranée. Cette seconde enceinte sert aujourd’hui d’atelier à 7 ou 800 galériens, qui traînent leurs boulets sous les belles voûtes bâties au xiiie siècle d’après les dessins de Boccanegra.

Dans un coin de l’arsenal est un ex-voto sarde avec cette inscription :

« Brigantino Sardo la Fenice, commandato da capitan’ Felice Peire, notte dai 13 ai 14 febbrojo 1835, essendosi aperta un entestatura di tavola Cale a Picco a l’isola di Laire. »

Un tableau représente l’événement : le navire sombre, la chaloupe s’abandonne à la mer, et la Vierge qu’elle invoque, et qui apparaît dans un coin de la toile, calme la tempête d’un signe.

En allant de l’arsenal de mer au vieux palais Doria, on trouve sur son chemin la porte Saint-Thomas : une petite porte s’ouvre dans la grande ; c’est en franchissant le seuil de cette petite porte que Gianettino, neveu du doge, fut tué.

Avant d’arriver à cette porte, on traverse la place d’Aqua Verde. C’est en ce lieu que Masséna, après avoir tenu soixante jours, avoir épuisé toutes ses ressources et avoir mangé jusqu’aux selles des chevaux, mangés eux-mêmes depuis longtemps, ayant signé au pont de Conegliano, avec l’amiral Keith et le baron d’Ott, sa belle capitulation qu’il intitula convention, rassembla le reste de sa garnison, 12,000 hommes à peu près, qui, pendant trois jours, y chantèrent, entourés d’Autrichiens, tous les chants patriotiques de la France.

Le palais Doria est le roi du golfe ; il semble, à le voir, que c’est pour le plaisir des yeux de ceux qui l’ont habité