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CHAPITRE LXIII.

UNE GOUTTE D’EAU.


lettrine A peine Rochefort fut-il sorti, que Mme Bonacieux rentra. Elle trouva milady le visage riant.

— Eh bien, dit la jeune femme, ce que vous craigniez est donc arrivé : ce soir ou demain le cardinal vous envoie prendre ?

— Comment savez-vous cela ?

— Je l’ai entendu de la bouche même du messager.

— Venez vous asseoir ici près de moi, dit milady.

— Me voici.

— Attendez que je m’assure si personne ne nous écoute.

— Pourquoi toutes ces précautions ?

— Vous allez le savoir.

Milady se leva et alla à la porte, l’ouvrit, regarda dans le corridor, et revint s’asseoir près de Mme Bonacieux.

— Alors, dit-elle, il a bien joué son rôle.

— Qui cela ?

— Celui qui s’est présenté à l’abbesse comme l’envoyé du cardinal.

— C’était donc un rôle qu’il jouait ?

— Oui, mon enfant.

— Cet homme n’est donc point ?…

— Cet homme, dit milady en baissant la voix, c’est mon frère.

— Votre frère ! s’écria Mme Bonacieux.

— Il n’y a que vous qui sachiez ce secret, mon enfant ; si vous le confiez à qui que ce soit au monde, je serai perdue, et vous aussi peut-être.

— Ô mon Dieu !

— Écoutez ; voici ce qui se passe ; mon frère, qui venait à mon secours pour m’enlever ici de force, s’il le fallait, a rencontré l’émissaire du cardinal qui