le double mouvement de la terre et l’ellipse qu’elle décrit autour du soleil, je sais plus exactement l’heure que si j’avais une montre, car une montre se dérange, tandis que le soleil et la terre ne se dérangent jamais.
Dantès n’avait rien compris à cette explication ; il avait toujours cru, en voyant le soleil se lever derrière les montagnes et se coucher dans la Méditerranée, que c’était lui qui marchait et non la terre. Ce double mouvement du globe qu’il habitait, et dont cependant il ne s’apercevait pas, lui semblait presque impossible ; dans chacune des paroles de son interlocuteur il voyait des mystères de science aussi admirables à creuser que ces mines d’or et de diamants qu’il avait visitées dans un voyage qu’il avait fait presque enfant encore à Guzarate et à Golconde.
— Voyons, dit-il à l’abbé, j’ai hâte d’examiner vos trésors.
L’abbé alla vers la cheminée, déplaça avec le ciseau qu’il tenait toujours à la main la pierre qui formait autrefois l’âtre et qui cachait une cavité assez profonde ; c’était dans cette cavité qu’étaient renfermés tous les objets dont il avait parlé à Dantès.
— Que voulez-vous voir d’abord ? lui demanda-t-il.
— Montrez-moi votre grand ouvrage sur la royauté en Italie.
Faria tira de l’armoire précieuse trois ou quatre rouleaux de linge tournés sur eux-mêmes, comme des feuilles de papyrus : c’étaient des bandes de toile larges de quatre pouces à peu près et longues de dix-huit. Ces bandes, numérotées, étaient couvertes d’une écriture que Dantès put lire, car elle était écrite dans la langue maternelle de l’abbé, c’est-à-dire en italien, idiome qu’en sa qualité de Provençal Dantès comprenait parfaitement.