Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 1.djvu/186

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Sur ma parole, dit l’inspecteur à demi voix, si l’on ne savait que cet homme est fou, il parle avec un accent si convaincu qu’on croirait qu’il dit la vérité.

— Je ne suis pas fou, Monsieur, et je dis bien la vérité, reprit Faria qui, avec cette finesse d’ouïe particulière aux prisonniers, n’avait pas perdu une seule des paroles de l’inspecteur. Ce trésor dont je vous parle existe bien réellement, et j’offre de signer un traité avec vous, en vertu duquel vous me conduirez à l’endroit désigné par moi ; on fouillera la terre sous nos yeux, et si je mens, si l’on ne trouve rien, si je suis un fou, comme vous le dites, eh bien ! vous me ramènerez dans ce même cachot, où je resterai éternellement, et où je mourrai sans plus rien demander ni à vous ni à personne.

Le gouverneur se mit à rire.

— Est-ce bien loin votre trésor ? demanda-t-il.

— À cent lieues d’ici à peu près, dit Faria.

— La chose n’est pas mal imaginée, dit le gouverneur ; si tous les prisonniers voulaient s’amuser à promener leurs gardiens pendant cent lieues, et si les gardiens consentaient à faire une pareille promenade, ce serait une excellente chance que les prisonniers se ménageraient de prendre la clef des champs dès qu’ils en trouveraient l’occasion, et pendant un pareil voyage l’occasion se présenterait certainement.

— C’est un moyen connu, dit l’inspecteur, et Monsieur n’a pas même le mérite de l’invention.

Puis se retournant vers l’abbé.

— Je vous ai demandé si vous étiez bien nourri ? dit-il.

— Monsieur, répondit Faria, jurez-moi sur le Christ de me délivrer si je vous ai dit vrai, et je vous indiquerai l’endroit où le trésor est enfoui.