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devant le loup. N’êtes-vous pas chasseur et grand louvetier ? Comment trouvez-vous, à ce double titre, le molli anhelitu ?

— Admirable, sire ; mais mon messager est comme le cerf dont vous parlez, car il vient de faire 220 lieues en poste, et cela en trois jours à peine.

— C’est prendre bien de la fatigue et bien du souci, mon cher duc, quand nous avons le télégraphe qui ne met que trois ou quatre heures, et cela sans que son haleine en souffre le moins du monde.

— Ah ! sire, vous récompensez bien mal ce pauvre jeune homme qui arrive de si loin et avec tant d’ardeur pour donner à Votre Majesté un avis utile ; ne fût-ce que pour M. de Salvieux, qui me le recommande, recevez-le bien, je vous en supplie.

— M. de Salvieux, le chambellan de mon frère ?

— Lui-même.

— En effet, il est à Marseille.

— C’est de là qu’il m’écrit.

— Vous parle-t-il donc aussi de cette conspiration ?

— Non, mais il me recommande M. de Villefort, et me charge de l’introduire près de Votre Majesté.

— M. de Villefort ? s’écria le roi ; ce messager s’appelle-t-il donc M. de Villefort ?

— Oui, sire.

— Et c’est lui qui vient de Marseille ?

— En personne.

— Que ne me disiez-vous son nom tout de suite ! reprit le roi en laissant percer sur son visage un commencement d’inquiétude.

— Sire, je croyais ce nom inconnu de Votre Majesté.

— Non pas, non pas, Blacas ; c’est un esprit sérieux,