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PHILOSOPHIE CHIMIQUE.

Lavoisier était entré à l’Académie des Sciences en 1768, à l’âge de 25 ans ; il y succéda à Baron, chimiste peu connu. Vous concevrez sans peine (car un exemple du même genre s’est reproduit sous nos yeux) que Lavoisier ayant déjà quelque réputation dans les Sciences, appartenant déjà à l’Académie qui se l’était attaché plutôt sur des espérances que sur des faits accomplis, dut exciter beaucoup de murmures en acceptant une place de fermier général. « C’est un jeune homme plein d’avenir, disait-on ; mais, s’il se jette dans la finance, il est perdu pour la Chimie, il ne produira plus rien. » Et, lorsque Lavoisier venait entretenir l’Académie de quelques découvertes : « Ah ! disait-on encore, quel dommage qu’il soit fermier général ! il ferait bien davantage. »

Est-il besoin de le justifier de ces reproches, de prouver que Lavoisier, comme fermier général, a fait tout ce qu’il fallait faire pour se montrer supérieur à son emploi, et que Lavoisier, comme chimiste, n’a jamais eu à redouter les distractions causées par les devoirs du fermier général ? En tous cas, la tâche serait facile, comme elle le serait s’il fallait justifier Cuvier des mêmes accusations, aujourd’hui que les passions qui le poursuivaient sont venues, mais trop tard, hélas ! s’éteindre sur sa tombe.