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LA REINE MARGOT.


Après ton dernier trépas,
Belle, tu n’auras là-bas
Qu’une bouchette blémie ;
Et quand, mort, je te verrai,
Aux ombres je n’avoûrai
Que jadis tu fus ma mie.

Doncques, tandis que tu vis,
Change, maîtresse, d’avis,
Et ne m’épargne ta bouche ;
Car au jour où tu mourras.
Lors tu te repentiras
De m’avoir été farouche.


Marguerite écouta cette chanson en souriant avec mélancolie ; puis, lorsque la voix de l’écolier se fut perdue dans le lointain, elle referma la fenêtre et appela Gillonne pour l’aider à se mettre au lit.




III

un roi poëte.


Le lendemain et les jours qui suivirent se passèrent en fêtes, ballets et tournois.

La même fusion continuait de s’opérer entre les deux partis. C’étaient des caresses et des attendrissements à faire perdre la tête aux plus enragés huguenots. On avait vu le père Cotton dîner et faire débauche avec le baron de Courtaumer, le duc de Guise remonter la Seine en bateau de symphonie avec le prince de Condé.

Le roi Charles paraissait avoir fait divorce avec sa mélancolie habituelle, et ne pouvait plus se passer de son beau-frère Henri. Enfin la reine mère était si joyeuse et si occupée de broderies, de joyaux et de panaches, qu’elle en perdait le sommeil.

Les huguenots, quelque peu amollis par cette Capoue nou-