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LA REINE MARGOT.

— Avec la moitié de ce qu’il vient de manger là, dit Catherine, mon chien Brutus est mort enflé en une minute. On m’a jouée. Est-ce René ? René ! c’est impossible. Alors c’est donc Henri ! ô fatalité ! C’est clair : puisqu’il doit régner, il ne peut pas mourir.

Mais peut-être n’y a-t-il que le poison qui soit impuissant, nous verrons bien en essayant du fer.

Et Catherine se coucha en tordant dans son esprit une nouvelle pensée qui se trouva sans doute complète le lendemain ; car, le lendemain, elle appela son capitaine des gardes, lui remit une lettre, lui ordonna de la porter à son adresse, et de ne la remettre qu’aux propres mains de celui à qui elle était adressée.

Elle était adressée au sire de Louviers de Maurevel, capitaine des pétardiers du roi, rue de la Cerisaie, près de l’Arsenal.




XXVIII

la lettre de rome.


Quelques jours s’étaient écoulés depuis les événements que nous venons de raconter, lorsqu’un matin une litière escortée de plusieurs gentilshommes aux couleurs de M. de Guise entra au Louvre, et que l’on vint annoncer à la reine de Navarre que madame la duchesse de Nevers sollicitait l’honneur de lui faire sa cour.

Marguerite recevait la visite de madame de Sauve. C’était la première fois que la belle baronne sortait depuis sa prétendue maladie. Elle avait su que la reine avait manifesté à son mari une grande inquiétude de cette indisposition, qui avait été pendant près d’une semaine le bruit de la cour, et elle venait la remercier.

Marguerite la félicitait sur sa convalescence et sur le bonheur qu’elle avait eu d’échapper à l’accès subit de ce mal étrange dont, en sa qualité de fille de France, elle ne pouvait manquer d’apprécier toute la gravité.